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38 – Et la « petite Suisse », dans l’affaire ?

Dernière modification le 15-8-2022 à 17:54:58

Où il est prouvé qu’une croissante fraction de sa population ne se laisse pas si docilement que ça tondre la laine sur le dos.

Ma trente-septième chronique s’achevait sur une mise en perspective des désastres environnementaux provoqués par les activités humaines à travers le monde et jusqu’au sein de notre « petite Suisse » – toutes contribuant à compromettre chaque année davantage les conditions de vie sur la planète Terre. Mais c’est que, s’agissant de cette « petite Suisse », Le Monde se fait souvent discret. Par conséquent, l’information, il fallait aller la chercher ailleurs. De petites mains s’étant portées à la rescousse (merci à toi, Brigitte !), j’ai eu l’agréable surprise de mieux encore réaliser que la société civile y était – et de loin – déterminée à ne pas se laisser tondre sans broncher la laine sur le dos. À la faveur d’articles publiés dans Le Temps, le magazine Pro Natura, de bulletins, de courriers et flyers diffusés ces derniers mois, j’ai – entre autres – relevé :

– Juin 2022. Tenue d’une première assemblée citoyenne nationale (buergerinnenrat.ch) destinée à se pencher sur le meilleur système alimentaire du futur ; assemblée à laquelle l’Association des petits paysans a apporté son soutien, supposant que « l’influence du lobby des groupes agroalimentaires sera moins importante sur l’assemblée citoyenne que dans les institutions politiques existantes » ;

– Juin toujours. À l’occasion des assises du climat lausannoises, il est proposé de « permettre aux citoyennes et citoyens de se prononcer par le biais de Conseils Citoyens en prenant l’exemple sur des expériences telles que le “Forum citoyen” de Genève, le “Conseil citoyen” d’Yverdon (20minutes) et une expérience similaire menée dans le quartier d’Entre-Bois à Lausanne. Le “Conseil citoyen sur la politique alimentaire”, au niveau national, vient de voir le jour. Il est soutenu financièrement par la Confédération. Plusieurs initiatives de démocratie délibérative ont aussi eu lieu en Suisse alémanique : le “Panel citoyen” à Uster a été financé par le Canton de Zurich et d’autres expériences ont suivi à Winterthur, Aarau, Thalwil » (article ProNatura) ;

– Juillet. La justice suisse ayant débouté les Aînées pour la protection du climat – ceci « pour des motifs purement procéduraux, sans examiner le bien-fondé de leur action pointant du doigt les carences suisses en la matière » –, l’avocat Raphaël Mahaim a décidé de porter la cause des “Aînées” auprès de la Cour européenne des droits de l’homme (Article RTS). Selon lui, « En interprétant les dispositions légales sur la qualité pour recourir de façon exagérément rigide, les tribunaux suisses ont jugé que les “Aînées n’étaient pas touchées avec une intensité suffisante” par la problématique du réchauffement climatique et qu’elles n’avaient donc pas la légitimité pour saisir la justice » ;

– Août. Dans le village vaudois de Bretonnières, inquiets du défrichement de plusieurs hectares de forêts mené en vue de la reprise de l’exploitation, par la cimenterie multinationale Holcim Ltd, d’une gravière en passe d’être réhabilitée après avoir été exploitée jusqu’en 2015, un groupe de militants écologistes s’est mobilisé. Une délégation emmenée par la députée Mathilde Marendaz (Solidarité & Écologie) s’est rendue sur le site en sorte de sensibiliser le grand public sur cette reprise d’exploitation. Plus généralement, les “zadistes” souhaitent – outre un large débat autour de ces sites d’extraction – que les autorisations soient soumises au Grand Conseil, voire à la population, au lieu d’être simplement délivrées par les communes concernées et les services de l’État.

– Août toujours. La dernière livraison de pro natura magazine publie un plaidoyer exposant les raisons écologiques de dire oui à l’initiative contre l’élevage intensif. « L’initiative demande que la dignité des animaux soit protégée dans l’élevage agricole. La Confédération doit édicter des critères pour un hébergement et des soins respectueux des animaux, l’accès à l’extérieur, l’abattage et la taille maximale des groupes par étable. Cela conduira à une diminution de la charge excessive que les animaux de rente font penser sur la nature ». En outre, un oui s’avère de nature à sauvegarder la biodiversité, protéger le climat, atténuer le changement structurel et préserver le paysage.

– Août encore. La coalition pour des multinationales responsables lance une pétition adressée au Conseil fédéral et au Parlement intitulée « Pour une loi forte et efficace sur la responsabilité des multinationales ». La conseillère fédérale Karin Keller-Sutter n’ayant cessé de marteler, à l’occasion de l’initiative de novembre 2020 acceptée par une majorité de la population mais recalée de peu à la majorité des cantons, qu’elle souhaitait une loi suisse sur la responsabilité des multinationales « coordonnée au niveau international », la voici placée devant ses responsabilités maintenant que la Commission européenne a présenté une loi en ce sens. « Tenez votre promesse, Madame la Conseillère fédérale ! »

– Ag!ssons, cette plateforme d’action citoyenne qui souhaite mettre en œuvre des vagues d’initiatives populaires construites autour d’un plan de société, s’apprête à lancer en terre vaudoise cinq propositions. Ce qui se trouve visé : la transparence et le plafonnement dans les dépenses des campagnes politiques ; la fin des cadeaux fiscaux aux multinationales et aux holdings ; la taxation de la publicité dans l’espace physique et virtuel ; l’accès à une alimentation de qualité, à circuit court ; cerise sur le gâteau : la constitution d’une « Chambre citoyenne » permanente, soit une initiative démocratique représentative de la population vaudoise capable de contrebalancer un système politique dont nul (ou presque) n’ignore qu’il est biaisé pour bien des raisons… dont la peur de n’être pas réélu !

– Extinction-Rébellion, mouvement social écologiste international, lance un appel à participation pour la prochaine « Marche du climat » qui se déroulera à Lausanne le 3 septembre et débutera à 14 :00 place de la Gare.

En 1795, le marquis de Sade lançait ce défi volontiers provocateur : « Français, encore un effort si vous voulez être républicains ». Pour ce qui nous concerne, confrontés à l’extrême inertie de nos représentants et des intérêts financiers qu’ils protègent, il nous en faudra davantage – et de beaucoup – si nous voulons vraiment que nos enfants survivent.

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