Dernière modification le 21-11-2024 à 15:01:31
Olivier Hamant discute de la transition des modèles socio-économiques, mettant en avant l’importance de la robustesse face aux systèmes actuels, performants mais fragiles. Il relève les éléments de la société moderne qui nous ont conduit à une impasse évolutive et propose une approche différente pour une période de transition, basée sur la diversification, la coopération et la reconnaissance de la vulnérabilité.
Le Concept de Robustesse
Olivier Hamant développe le concept de la robustesse, qu’il présente comme un élément nécessaire à la pérennité dans un monde fluctuant. Contrairement à la performance, la robustesse n’est pas centrée sur la compétition ou l’efficacité à court terme, mais sur la capacité à survivre et à prospérer en élargissant les bornes et les options disponibles. Cela s’oppose à la résilience qui, selon lui, est souvent perçue comme une simple capacité à se relever après une chute, mais sans s’attaquer aux racines de la fragilité initiale.
Pour Amant, la robustesse est une approche proactive où la diversification et la flexibilité sont prépondérantes. Elle permet d’éviter les impasses évolutives dans lesquelles la société actuelle est piégée, particulièrement en raison de la spécialisation excessive et du refus d’adaptation.
Les Modèles Actuels
Les modèles actuels de gouvernance et d’économie basés sur la performance, la compétition et l’efficacité sont les valeurs dominantes actuelles. Cependant, face à des ressources fluctuantes et à des crises multiples, ces valeurs deviennent non seulement insuffisantes mais aussi dangereuses, car elles augmentent la fragilité du système.
La compétition à outrance mène à des comportements d’exploitation des ressources sans considérer leurs conséquences sur le long terme. Amant cite l’exemple du Bitcoin qui, bien qu’étant une monnaie décentralisée, reste énergivore et contribue indirectement à une dynamique extractive. Les mêmes défauts se retrouvent dans l’usage intensif des énergies fossiles et mêmes des solutions énergétiques émergentes comme les batteries de voiture.
Recommandations pour une Transition
Pour Olivier Hamant, la clé de la transition repose sur une nouvelle forme de gouvernance à différentes échelles, de l’état aux collectifs locaux. L’état ne doit plus être perçu comme un meneur qui impose des solutions descendantes, mais comme un acteur qui met en résonance les initiatives locales et les fait évoluer dans un cadre plus vaste.
Il mentionne les travaux d’Elinor Ostrom sur les biens communs, mettant en avant les huit principes de gouvernance pour garantir la durabilité des ressources partagées. Pour lui, l’avenir repose sur la construction et la mise en réseau de communs qui permettent une meilleure résilience aux crises tout en évitant la logique de simple survie (survivalisme radical).
La recarbonation de l’économie est également une priorité. Au lieu de décarboner, c’est-à-dire remplacer le carbone par des métaux rares et polluants, il propose de replacer le carbone dans une économie circulaire, en utilisant des matériaux biosourcés et renouvelables.
La Place de la Spiritualité et de la Culture
Olivier Hamant aborde également la dimension spirituelle. Il fait la distinction entre pouvoir et puissance dans les systèmes religieux, rappelant que les structures dogmatiques ont souvent pris le pouvoir au nom de Dieu, alors que la spiritualité est initialement censée créer du lien et de la cohésion sociale. Selon lui, le futur doit aussi inclure une forme de spiritualité renouvelée, non dans une perspective dogmatique mais comme un moyen d’établir des connexions plus profondes entre les personnes.
Il critique la recherche de la performance personnelle, liée au patriarcat, et promeut un écoféminisme qui valorise la coopération et la reconnaissance des valeurs liées au soin et au bien-être collectif. Cette réflexion culturelle va de pair avec le besoin de robustesse et de pratiques résilientes dans la vie quotidienne.
Références Littéraires et Médias
- « Limits to Growth » (Rapport Meadows) : Ce livre explore les limites écologiques de la croissance économique et propose un modèle pour comprendre les conséquences de la surutilisation des ressources naturelles.
- « Homo Confort » de Stefano Boni : Une analyse de l’impact du confort moderne sur nos perceptions sensorielles et nos interactions avec le monde. Ce livre aide à comprendre comment l’abondance matérielle a altéré nos comportements et créé un rapport hermétique au monde.
- « Rendre le monde indisponible » de Hartmut Rosa : Une réflexion sur la manière de reprendre du temps pour soi, en évitant l’accélération de la vie quotidienne. Cela permet de reconnecter aux éléments tangibles de son environnement et d’être plus ancré dans son espace.
- Travaux d’Elinor Ostrom sur les communs : Ces travaux, qui ont valu à Ostrom un prix Nobel, explorent la gouvernance des biens communs et mettent en évidence les huit principes nécessaires pour la gestion durable des ressources partagées.
- « Contre la Résilience » de Thierry Ribault : Ce livre critique l’usage abusif du terme « résilience », en particulier l’exemple du Japon après Fukushima, montrant à quel point cette notion peut devenir une arme politique pour forcer la population à s’adapter sans traiter les causes profondes du problème.