Dernière modification le 1-6-2022 à 15:25:03
Le Monde, 3 novembre 2021. « Relever les défis de l’infertilité », Science & médecine, pp. 1, 4 et 5.
Le nombre de couples qui recourent à l’assistance médicale à la procréation (AMP) s’avérant toujours plus important (200 000 enfants en 2018, contre 100 000 en 2008, ont ainsi vu le jour en Europe), l’infertilité commence à cesser d’apparaître comme une de ces « maladies honteuses » dont on se garde de parler. Parce qu’elles s’intensifient sous l’afflux des réalités, les recherches en biologie de la reproduction permettent aujourd’hui de mieux appréhender ce phénomène croissant. Dans ce contexte, il apparaît toujours plus clairement que l’âge des couples optant pour l’AMP peut s’avérer déterminant. Côté femmes (en France, 21% d’entre elles accouchent désormais pour la première fois à plus de trente-cinq ans), on constate que passé le cap des 30 ans, leur réserve ovarienne commence à diminuer. Chez les hommes, l’appareil reproducteur n’est pas non plus à l’abri du passage du temps… fût-ce un peu plus lentement. Pourtant, âge mis à part, comment – notamment – expliquer ce fait qu’en moins de quarante ans la concentration de spermatozoïdes ait pu diminuer de 50% chez les hommes d’Amérique du Nord, d’Europe et d’Australie ?
Outre une mauvaise alimentation, le tabagisme et l’obésité – autant de facteurs de risque pointés du doigt –, des études toujours plus poussées mettent en avant le rôle que pourrait jouer, dans cette multiplication des cas d’infertilité contre lesquels la médecine se casse parfois les dents, l’exposition aux pesticides. Aux solvants. Aux métaux lourds. Aux médicaments. À toutes sortes de perturbateurs endocriniens entrant dans la composition de cosmétiques, dentifrices, gels douche, huiles essentielles, etc. À quoi s’ajoutent certains facteurs psychosociaux en milieu professionnel. La liste n’est pas close.
Concomitant avec les désastreuses perspectives qui mobilisent ces jours les représentants des pays signataires de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques, il convient donc d’admettre que le climat ne constitue qu’un élément, certes critique, du Grand dérèglement général occupé à porter atteinte au Vivant. Dérèglement fomenté, de façon toujours plus massive, par des capitaines d’industrie prompts à détourner résolument leurs yeux – au nom du sacro-saint « retour sur investissement » – des conséquences actuelles et à terme de leurs entreprises. Dérèglement entretenu par un trop peu d’information… voire par une désinformation plus ou moins habilement distillée.
Une bonne raison de faire bon accueil à ce que livrent, au terme d’années d’études, maints scientifiques très souvent exposés aux tirs nourris des lobbyistes et autres faiseurs d’opinion.
Savoir – en sorte d’agir –, avant que l’affolement ou la résignation ne gagne la partie.