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43 – Philippe Nantermod, le psychiatre et les électrochocs.

Dernière modification le 1-11-2022 à 14:59:34

Le Monde, 23 octobre. « Mourir d’un monde abîmé », chronique Planète, p. 34.

Sans trêve, le bras de fer se poursuit, opposant aux offensives de la grande industrie – comme à l’ahurissante inertie des pouvoirs publiques – une fraction croissante de la population consciente des atteintes majeures portées à un environnement garant de la viabilité de la planète Terre. Celles et ceux qui ont pu voir État de nécessité, le film de Stéphane Goël consacré à deux d’entre « les affaires judiciaires impliquant des militant.e.s de la lutte contre le dérèglement climatique », en auront sur-le-champ saisi le caractère implacable au moment où, faisant écho à Anaïs Tilquin, chercheuse et porte-parole de Rise up for Change évoquant les cauchemars que la situation lui inspirait, l’avocat valaisan PLR Philippe Nantermod lui réplique : « Faut consulter un psychiatre ! ». Réponse dont on appréciera – outre la rare goujaterie – toute l’inadéquation en consultant le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC).

Bras de fer donc et course contre la montre. Dans ce contexte bien sûr, nulle avancée positive ne serait être négligée… quand bien même certains titres puisés dans Le Monde – « Le sorgho, culture d’avenir face au réchauffement », « Mobilisation contre le projet d’autoroute A69, jugé “anachronique” » (25 octobre), « BNP Paribas sommée de cesser de financer le fossile » et « Sobriété, planification… les consultations citoyennes se multiplient » (27 octobre) – se heurtent brutalement à quelques autres du type « Niveaux record de gaz à effet de serre dans l’atmosphère » (28 octobre).

De quoi se demander combien de milliers de David très déterminés vont être nécessaires, s’agissant de contrebalancer l’avancée triomphale d’une poignée de Goliath !

Dérèglement climatique (d’où monstrueuses canicules, sécheresses et inondations) ; pollution des sols, des eaux, atteintes à la santé publique et effondrement de la biodiversité liés aux méfaits de l’agrochimie ; effets délétères d’une alimentation industrielle ultra-transformée… Autant d’annonces auxquelles les lecteurs de journaux sont désormais confrontés. Or il y a quelques jours de cela, une chronique de Stéphane Foucart faisant écho à la page 7 du quotidien français poussait un peu plus loin encore le goujon.

Ce dont il était question dans cette fameuse page 7 ? Du fait que le Covid-19 venait d’engendrer une chute historique de l’espérance de vie (les pays d’Europe centrale et de l’Est étant les plus touchés, avec des baisses allant jusqu’à 3,5 ans en Bulgarie) ; mais encore qu’aux États-Unis, en seulement deux ans, la même espérance de vie avait chuté de 2,7 ans sous l’effet – notamment – du Covid-19 mais aussi d’un usage massif de médicaments antidouleur à base d’opiacés découlant de « campagnes de marketing agressives » de la part d’une industrie pharmaceutique toujours prompte à soulager les maux des patients !

Quant au commentaire de Stéphane Foucart à propos de ce que les spécialistes de santé publique appellent désormais « syndémie » – soit l’intrication de facteurs délétères qui se potentialisent et s’aggravent mutuellement –, je ne résiste pas à en livrer ici deux extraits édifiants :

– « Singulière, la situation américaine pourrait ne pas le rester. D’abord parce que les États-Unis inspirent largement les politiques publiques européennes, et que ce qui s’y passe finit bien souvent par franchir l’Atlantique – le fétichisme de la concurrence, le désarmement de l’État, le transfert de toujours plus d’activités au marché, etc. Ensuite parce que nombre de pays européens commencent, eux aussi, à voir leur espérance de vie arriver à un quasi-plateau » ;

– « Abîmer le monde : comment cela n’aurait-il pas d’effet sur la vie des humains ? La réalité est que cette idée n’est jamais allée de soi. Depuis sa naissance dans les années 1960, le mouvement environnementaliste moderne n’a cessé d’être contredit par la courbe triomphale et l’élévation de l’espérance de vie. À quoi bon entraver l’industrie, réguler l’économie, préserver les biens communs, protéger l’environnement et se soucier du long terme, puisque, malgré l’anthropisation galopante du monde, l’indice roi de notre bien-être continuerait de grimper avec entêtement ? L’avenir dira donc si le choc syndémique du Covid-19 signe, ou non, le franchissement d’un point d’inflexion, le début d’un long plateau ou l’inversion durable de la courbe d’espérance de vie »… sachant que les États ne se privent pas d’agir fréquemment comme « des freins aux mouvements d’adaptation structurels ».

Quant à recommander à Monsieur Nantermod, en lieu et place du psychiatre qu’il conseille à Anaïs Tilquin, une série d’électrochocs… Qu’on ne me fasse pas dire ce que je répugne à imaginer !

Post-scriptum.
Qu’on se rassure : l’« interruption », par un élu de l’UDC, de la séance d’information de Renovate Switzerland dont fait état l’édition du Temps de vendredi dernier n’a nullement mis un terme à la rencontre. Simplement, celle-ci s’est tenue dans un autre lieu que celui initialement prévu. En outre, prétendre que le hardi perturbateur est parvenu à « infiltrer » Renovate prête plutôt à sourire : l’annonce de ladite réunion figurait sur internet.

RTS 21.09.2020 (séquence finale parue dans le documentaire de Stéphane Goël, « Faut consulter un psychiatre ! »).

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