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La Suisse face à ses responsabilités climatiques

Dernière modification le 2-9-2024 à 19:06:43

Une action insuffisante pour répondre aux exigences européennes

En réponse à l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) dans l’affaire des « Aînées pour le climat », le Conseil fédéral suisse a réaffirmé sa position sur la protection du climat. Tout en reconnaissant l’importance de la Convention européenne des droits de l’homme, le Conseil fédéral a critiqué l’interprétation de la CEDH en matière de protection climatique et a rejeté l’extension du droit de recours des associations en la matière (réf. 28.08.2024).

Une interprétation restrictive des droits humains

La réticence du Conseil fédéral à accepter l’interprétation de la CEDH, qui intègre la protection contre les effets du changement climatique dans le cadre des droits de l’homme, reflète une vision limitée de la justice climatique. En refusant d’élargir le droit de recours des associations sur les questions climatiques, la Suisse semble vouloir minimiser l’influence des acteurs de la société civile dans le débat climatique. Cette position est d’autant plus problématique que les groupes les plus vulnérables, comme les « Aînées pour le climat », cherchent justement à obtenir des recours pour des politiques climatiques plus ambitieuses qui protégeraient leurs droits à la vie, à la santé et à un environnement sain.

Les limites de la politique climatique suisse

Le Conseil fédéral estime que la Suisse satisfait aux exigences de l’arrêt de la CEDH en matière de politique climatique, notamment grâce à la loi révisée sur le CO2 du 15 mars 2024 et à la loi fédérale de 2023 sur l’approvisionnement en électricité à partir d’énergies renouvelables.

Pourtant, ces mesures ne traitent que les émissions de CO2 internes à la Suisse, qui s’élèvent à environ 4 tonnes par habitant. Ce chiffre est cependant trompeur lorsqu’on considère l’empreinte carbone totale de la Suisse, qui inclut les émissions externalisées, c’est-à-dire celles générées par la production de biens et services importés. En 2020, cette empreinte carbone totale atteignait 11,2 tonnes de CO2 par habitant, soit près de trois fois plus que les émissions internes. En se concentrant uniquement sur les émissions domestiques, la Suisse néglige une part substantielle de son impact environnemental global.

La situation climatique actuelle exige de la Confédération qu’elle impose des mesures contraignantes pour réduire toutes les formes d’émissions, tant internes qu’externalisées.

L’urgence d’imposer des mesures contraignantes

Face à la gravité de la crise climatique mondiale, la Confédération a le devoir d’imposer des mesures plus strictes et contraignantes pour réduire ses émissions de gaz à effet de serre, au-delà de ce qui est actuellement prévu par les lois en vigueur. Les engagements actuels ne suffisent pas à répondre à l’urgence de la situation et à la nécessité d’une réduction rapide et significative des émissions. En tant que membre du Conseil de l’Europe, la Suisse a aussi l’obligation de respecter et de promouvoir les droits de l’homme, ce qui inclut le droit à un environnement sain. Ignorer cette obligation, c’est ignorer la réalité des impacts du changement climatique sur les droits humains.

Un appel à une politique climatique plus ambitieuse

La Suisse doit adopter une politique climatique plus ambitieuse qui prenne en compte la totalité de son empreinte carbone, y compris les émissions externalisées, et impose des mesures contraignantes pour faire face à la crise climatique actuelle. En alignant sa politique climatique sur les impacts globaux de ses actions, la Confédération peut faciliter une transition rapide vers une économie bas-carbone et une meilleure protection de l’environnement.

L’arrêt de la CEDH dans l’affaire des « Aînées pour le climat » rappelle clairement les responsabilités de la Suisse. Plutôt que de critiquer l’interprétation de la Cour, la Suisse doit démontrer un leadership véritable en matière de justice climatique. Adopter une politique plus stricte et ambitieuse est essentiel non seulement pour répondre à l’urgence climatique, mais aussi pour respecter ses obligations envers les générations futures et la communauté internationale, évitant ainsi une aggravation de la catastrophe environnementale en cours (1).

Référence

  1. Il est crucial de reconnaître que la crise climatique ne peut être dissociée d’autres crises écologiques interconnectées, telles que l’effondrement de la biodiversité, la pollution globale, et les pénuries de ressources. Les médias ont souvent tendance à simplifier les enjeux complexes en se concentrant principalement sur la question du CO2. Cependant, les solutions climatiques développées peuvent parfois exacerber d’autres problèmes écologiques, comme la rareté des ressources et la dégradation de la biodiversité (lire l’article).

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