mardi , 23 avril 2024

Jancovici : Croissance, climat et limites physiques

Dernière modification le 29-7-2021 à 21:13:11

EDF lance son cycle de conférences « ECO₂ par EDF » dans lesquelles économie et préservation de l’environnement s’invitent dans les débats. Pour cette seconde édition animée par Frédérique Bedos (FB), l’expert de l’énergie et président du Shift Project, Jean-Marc Jancovici (JMC), nous présente sa vision et son approche macro-économique d’une société neutre en carbone et respectueuse du vivant. Débat en compagnie de Thomas-Olivier Léautier (TOL), Chef économiste d’EDF.

Minutage vidéo et transcription

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Minutage, notes…

Minutage

0:00 INTRODUCTION

4:25 TOL: pas dans 100 ans ou 200 ans

6:00 TOL: Clarifier le débat pour les citoyens.

7:38 JMC: DÉBUT-CONFÉRENCE

8:05 économie, renouvelable et non renouvelable

8:58 Gratuit

9:33 Transformation

9:47 Flux : je. prends, je transforme pour mon intérêt

10:20 L’énergie un amplificateur de prélever et de transformer

10:42 Stockage pour augmenter la production future

11:11 Baisser les ressources non renouvelables et renouvelables

11:34 Sous-produit, transformation

11:47 Économie = gaspillage, pollution

12:23 Économie = Je prends je transforme et je pollue = économie

12:37 Économie = deux flux = ? prix réel ?

13:19 Pas parce que le PIB augmente qu’on s’enrichit

13:54 Le système postule que nous sommes dans un monde infini

14:30 Drame initial = approximation

14:40 Ministre : pas sur qu’il connaisse la définition de l’énergie

14:50 L’énergie, qu’est-ce ?

15:30 L’énergie est la nourriture des machines

15:40 La machine que nous sommes, quelle énergie ?

16:21 Mixer à soupe = 4 cyclistes

16:50 Aspirateur = 10 cyclistes

17:06 Ascenseur = 50 cyclistes

17:14 Tracteur = 600 jambes ou 90 chevaux

17:26 Engin public = 10’000 paires de bras

17:42 Camion =  4’000 paires de jambes

17:51 Laminoir industriel = 10’000’000 paires de bras

18:15 Laminoir, piloté par une personne

18:26 Les machines travaillent pour nous

18:38 Elles démultiplient la puissance musculaire par plusieurs centaines

18:43 Sans machine, PIB mondial divisé par 100 à 200

19:11 Graphique : Énergie/PIB

19:31 Économiste théorise la fin du travail…

19:40 Société sobre = travail

19:51 Graphique : énergie essentiellement fossile

20:03 Énergies renouvelables : critique politique, journalistes et EDF

20:24 L’essentiel des énergies est les fossiles (80%)

20:43 RIEN décarboner du tout !

21:06 DRAME des négociations climat

21:22 Aujourd’hui on ne sait pas faire plus de PIB avec moins de CO2

21:25 Conclusion : on ne sera jamais faire pour garder la civilisation industrielle aujourd’hui on allant vers la neutralité carbone. civilisation

21:36 Aller à la neutralité carbone c’est accepter une récession structurelle

21:41 Économie : historique (1803)

22:23 Théorise une économie classique = ressource naturelle valent zéro, monde infini

23:03 Sauf que… (supermarché)

23:55 Idée économie désincarnée ça ne marche pas

24:07 Le travail c’est la transformation

24:15 Le capital = transformation de ressource naturelle

24:25 Pour une raison voulue ou subie les réservoirs sont vide, plus assez d’énergie fossile

24:41 il ya du pognon partout, on ne sait plus quoi en faire

24:56 Stress sur l’énergie = stress sur PIB

25:23 Représentation économie physique…

25:36 Passer du fossile au décarboné…

25:57 Stress PIB, aujourd’hui PIB faux

26:23 Graphique rapport Meadows

27:00 Explication graphique Meadows

27:31 Tout continuerait à aller bien

27:41 Après vous pouvez retourner le problème dans tous les sens le système s’effondre sur lui-même.

28:10 Tout diminue de façon drastique

28:31 Dans le courant du XXIe siècle, tout s’effondre

28:33 Essayer pour les prochaines présidentielles de sortir un programme économique sans croissance !

28:47 Accord de PARIS : neutre en carbone en quelque décennie = -5% par an ! ?

29:14 Ça veut dire que nous sommes en récession structurelle !

29:22 A quoi ça ressemble ? Dans un monde ou la sobriété devient le maître mot

29:55 Tous les gens qui racontent que l’on va s’en sortir avec les renouvelables (croissance verte)…

30:08 FIN conférence -> débat

30:50 Thomas-Olivier Léautier, Chef économiste d’EDF répond

31:09 TOL: d’accord sur tout sauf sur décroissance future

31:38 TOL: Urgence climatique = calculs, on peut décarboné…

32:47 TOL: éviter l’effondrement (JMC sceptique)

33:08 TOL: d’un point de vue technologique, on y croit

33:31 TOL: moins confiant sur la capacité collective à se mettre en mouvement dans le temps qui nous est imparti

33:54 TOL: déclarations, promesses, mais pas d’actions

34:04 TOL: Société civile s’empare du problème et pousse politiques actives

34:23 TOL: impact plus global sur la biodiversité

34:55 TOL: pas confiant que l’on s’empare du problème biodiversité, mais confiant technologie 

35:14 JMC: question -> rejoint vision possible décarboner ?

35:40 JMC: réponse : si on avait énergie décarbonée, on continue à piétiner sur le reste

36:14 JMC: pression humaine, ne règle pas tous les problèmes

36:35 JMC: scénario, pas un qui soit bouclé

36:41 JMC: scénario AIE (Agence internationale de l’énergie) = conte de fées

36:55 JMC: 5% facile dans un tableur, mais pas dans la vraie vie

37:10 JMC: on continue à utiliser des fossiles. Capture carbone…

37:20 JMC: masse 7 milliards de tonnes

37:36 JMC: capture dans 30 ans: 9 milliards, ça ne va pas arriver

37:58 JMC: production métal, multiplier production nickel par 20 en 20 ans, cuivre par 3 en 20 ans

38:24 JMC: jamais vu scénario de croissance verte bouclée, pas un

38:40 JMC: Shiftproject, pari de fonctionner dans un monde sans croissance

38:44  JMC: si pari qu’il y aura et qu’il n’y en a pas, on est coincé, on se met dans une situation ou la marmite sociale explose

38:54 JMC: on résonne par secteur, ressource, gens

39:22  JMC: s’il faut passer des voitures électriques au vélos électriques, c’est ça qu’il faut faire. Peu importe le coût

39:38 JMC: on va prendre le problème sur l’angle physique.

39:50 JMC: faire rentrer 2 à 3 centiles-personne dans l’artisanat du bâtiment

40:02 JMC: s’ils sont nuls, ils feront maçons…

40:07 JMC: il y a plein de trucs à changer

40:12 JMC: rapport rapport Tirole Blanchard totalement désincarné, fait par des gens en chambre…

40:27 JMC: secteurs (shifters), spécialiste de chaque secteur

40:44 JMC: appel au peuple pour avancer sur tel sujet

41:05 JMC: présenter à public aussi large que possible, avis externes

41:25 JMC: population française, préserver environnement, même si nuire à la croissance et emploi…

41:56 JMC:  plus les gens sont vieux plus ils sont favorable à la croissance…

42:15 FB: commente et questionne

42:20 FB-JMC croissance verte -> oxymore

42:32 FB: commente et questionne

42:43 FB: sur quoi on base l’espoir

43:13 TOL: points communs entre EDF et JMC…

43:51 TOL: shift project intelligence collective

44:05 TOL: carbone pas suffisant, environnement important

44:34 TOL: désaccords, rapport, EDF réduction 29% 2030

45:14 TOL: 3% possible, trouve que les chiffres ne sont pas choquants

45:35 TOL: prix du carbone permet de modifier le comportement des gens

45:56 TOL: exemple, fermer centrale charbon, ou 100€ la tonne

46:35 TOL: prix CO2, commencer par ça

46:54 TOL: Rapport Blanchard Tirol concret, pratique et juste

47:04 JMC: Réponse globale ni pour ni contre. Mais désincarné.

47:30 JMC: Polonais remplacer centrale à charbon par éolienne

47:33 JMC: dans une course contre la montre il faut être pragmatique

47:48 JMC: bas carbone pilotable, hydroélectricité et nucléaire

48:09 JMC: Suisse

48:16 JMC: Belgique et Pologne

48:32 JMC: France, remplacer nucléaire délétère

48:58 JMC: 50 fois moins de métal et de capacité de batterie qu’une voiture

49:12 JMC: très favorable à la pompe à chaleur

49:29 JMC: plus vite que 3% dans certains secteurs, mais pas tous

50:00 JMC: ce qu’il nous manque c’est d’être pragmatique

50:07 JMC: on se dirige vers la barbarie, luxe de nanti

50:21 JMC: on est dans une course contre la montre pour nous préserver des guerres, etc.

50:32 JMC: ce qu’il nous manque c’est la capacité à faire comprendre le problème

50:38 JMC: on ne peut pas compter sur la classe politique qui en démocratie est essentiellement  totalement démagogique pour faire la pédagogie du problème 

50:43 JMC: ni sur acteurs qui n’ont pas intérêt que l’on change les règles de jeux

50:51 JMC: ni sur les journalistes (réaction, explication)

51:43 JMC: le vrai danger (pédagogique)

52:03 JMC: la taxe carbone, avis

53:05 JMC: convaincu qu’il faut passer par la réglementation (interdiction)

53:49 TOL: tu aimes l’économie (rires)

54:00 TOL: Rapport Blanchard Tirol, c’est ce qu’ils disent (JMC pas d’accord)

55:10 TOL: redistribution …

55:35 TOL: impacter les voisins (taxe)

56:04 TOL: gouvernance : institution indépendante et transparente

56:34 TOL: en tant que scientifique affolé du manque de transparence

56:48 FB: Passe aux questions du public

57:12 FB: matières premières

57:22 JMC: quand on a une matière première essentielle à l’économie…

57:57 JMC: matière plus rare, économie se porte moins bien…

58:23 JMC: AIE pétrole bas, pétrole haut …

58:31 JMC: pourquoi matière première peuvent faire un peu plus défaut (teneur en métal)

59:18 JMC: marquer économiquement

59:24 JMC: marqueur raréfaction (remarque Meadows)

1:00:19 TOL: oui, mais recyclage (exemple aluminium)

1:00:54 TOL: le système s’adapte

1:01:12 JMC: recycler le pétrole c’est plus dure (rires)

1:01:18 TOL: faire d’autres énergies. Capacité d’adaptation

1:01:38 JMC: limites à la substitution

1:01:54 JMC: 50 à 100 fois plus de métal pour faire 1kWh solaire que pour faire 1kWh nucléaire ou charbon ou gaz

1:02:05 JMC: 1000 fois plus de fonciers pour faire de l’électricité avec du solaire qu’avec du nucléaire

1:02:13 JMC: explication

1:02:34 JMC: système pas bouclé (explication essentielle)

1:03:03 JMC: artefact économique. Je n’y crois pas du tout aux projections des prix de l’AIE

1:03:22 FB: commente

1:03:33 FB: dans quelle échelle de temps on va faire face à ce défit

1:03:35 JMC: tout de suite

1:03:41 FB: Comment société démocratique volontairement organiser la réduction structurelle du PIB, nécessaire CO2

1:03:53 JMC: la récession structurelle à déjà commencé

1:04:11 FB: 2007, pourquoi?

1:04:17 JMC: 2007, pic production pétrole conventionnel

1:04:40 JMC: dates des zones qui décline (pays)

1:05:22 JMC: dégradation environnementale extraction et eau

1:05:42 JMC: vrai problème, fossile, surface …

1:06:28 JMC: on ne gagne rien avec le pétrole de schiste

1:06:47 JMC: production de pétrole conventionnel à décliné depuis 2008

1:07:01 JMC: déclin gaz (2005)

1:07:08 JMC: déclin charbon européen (1960)

1:07:24 JMC: Europe, climat ou pas climat, en déclin

1:07:31 JMC: croissance n’existe plus. Fausse croissance (explication)

1:08:12 JMC: prix des terres agricoles dans le monde multiplié par 6 en 12 ans

1:08:20 JMC: pourquoi 2007 ? Pas besoin de vendre décroissance au public français, car elle est déjà là !

1:08:43 JMC: collocation = sobriété

1:09:03 JMC: décroissance dramatique ? Indicateur monétaire (explication)

1:09:49 JMC: par exemple: vélo plutôt que voiture, forme, santé

1:10:09 JMC: avantages non économiques, mais avantages réels

1:10:19 JMC: quitter le débat purement économique, ajuster le système !

1:10:44 FB: commente et questionne

1:11:06 FB: que peuvent faire les collaborateurs depuis l’intérieur ……

1:11:28 TOL: pas besoin de convaincre EDF. Stratégie, décarboner …

1:13:05 TOL: PIB, sobriété (explique)

1:13:48 TOL: décroissance économie 3 à 5% pas de la sobriété, c’est autre chose, c’est compliqué, dans une société stable, on ne veut pas aller là

1:14:39 FB: commente (TOL-JMC interviennent)

1:14:52 FB: Quel indicateur économique pour remplacer le PIB ?

1:14:58 JMC: pas nécessaire de le remplacer (explications)

1:15:07 JMC: exemple idiot, puissance musculaire

1:15:53 JMC: pareil concernant le PIB, plan pour l’avenir…

1:16:22 JMC: je ne suis pas entrain de dire « y’a qu’a, faut qu’on »

1:16:30 JMC: exemple sobriété (logement)

1:16:51 JMC: tant qu’on n’a pas réfléchi on ne va rien trouver

1:17:11 JMC: moins serein que TOL, dernières catastrophes (canada, etc.), ,juste un apéritif

1:17:57 JMC: dizaines de millions de personnes qui voudront aller voir de l’autre côté de la Méditerranée le temps qu’il fait 1:18:10 JMC: l’idée que l’on va pouvoir vivre sans un monde stable … je n’y crois pas

1:18:25 JMC: la décroissance du PIB on va se la farcir

1:18:31 JMC: réfléchissons maintenant … à quelque chose qui n’a pas besoin de croissance

1:18:47 JMC: je ne suis pas un collapsologue

1:18:57 JMC: je dis, puisque c’est un risque …

1:19:08 JMC: cahier des charges, diminution de moyen parce que la terre est finie et c’est comme ça

1:19:26 TOL: deux réponses, urgence d’accord ! Ça n’est pas coercitif, Corée du Nord

1:20:11 TOL: prix du carbone

1:20:21 TOL: tu vas adorer. Le PIB n’est plus la mesure utilisée par les économistes pour mesurer le bienêtre. pour m

1:20:29 TOL: nouvelle réflexion économique, mêmes auteurs que le rapport Meadows

1:20:44  TOL: Rapport Dasgupta

1:20:51 TOL: il dit : …. évolution des ressources naturelles

1:21:35 FB: Quelle est la différence entre une décroissance et récession ?

1:21:40 JMC: une récession est une décroissance du PIB

1:21:49 TOL: la récession c’est temporaire, la décroissance c’est plus à long terme

1:22:10 JMC: Différence en définition technique et le sens qu’on lui donne en termes de valeur

1:22:37 FB: Quel serait votre conseil pour accroître la connaissance au plus vite

1:23:07 JMC: si il y avait une solution miracle on l’aurait déjà trouvée. Il faut répéter, répéter, répéter et ça ne va pas assez vite !

1:23:18 FB: clôture de la conférence.

Transcription complète

Transcription

00:00:12
FB: Bonjour.

00:00:12
FB: Bonjour à toutes et à tous, bienvenue dans notre cycle de conférences qui s’intitule Conférence CO2 par EDF. Parlons économie neutre en carbone. Je m’appelle Frédérique Bedos, je suis journaliste fondatrice d’une ONG d’information qui s’appelle le projet Imagine et j’ai le grand plaisir de vous accompagner tout au long de ce cycle. Je suis en bonne compagnie puisque à mes côtés se trouvent

00:00:35
FB: Thomas Olivier et qui représente le groupe EDF et qui, à ce titre, est mon acolyte de conférence en conférence et notre invité du jour,

00:00:44
FB: Jean-Marc Jancovici. Bonjour. Merci d’avoir accepté notre invitation. Dans un instant, je vais vous présenter en détail, mais peut être d’abord juste vous dire quelques mots sur nos masques. Les conditions sanitaires qui, évidemment, sont strictes. Vous connaissez la période que nous vivons et donc pendant tout, tout au long de cette conférence. En fait, je vais garder mon masque parce que l’un et l’autre, vous n’êtes pas si éloignés de moi que cela. Mais comme vous êtes éloignés l’un de l’un de l’autre, vous aurez l’autorisation d’enlever votre masque quand vous prendrez la parole. Et donc, voilà, on va. On va faire un petit peu cette gymnastique, mais c’est pour la bonne cause.

00:01:21
FB: Alors, Jean-Marc Jancovici, vous êtes ingénieur enseignant à Mines ParisTech. On peut dire que vous faites partie du cercle restreint des personnalités considérées comme étant expertes sur les sujets relevant de l’énergie et du climat. Vous êtes d’ailleurs membre du Haut conseil pour le climat et vous êtes associé fondateur du cabinet Carbone 4.

00:01:41
FB: Mais c’est sans doute en tant que fondateur et président du site de Shift Project que l’on vous connaît le mieux, la spécialité de ce think tank portant sur la difficile question de la décarbonisation de l’économie. Vous êtes l’auteur de nombreux ouvrages, dont celui qui vient à peine de sortir en poche. Dormez tranquille jusqu’en 2100. Alors, quelque chose me dit qu’il y a comme une touche d’ironie dans cette invitation collective à dormir. Mais avant qu’on ne plonge plus avant dans votre pensée, je vais me tourner vers vous.

00:02:10
FB: Thomas Olivier Lautier Et on va revoir un peu votre parcours. Vous avez fait Polytechnique, Les Ponts et Chaussées. Vous êtes passé par le Mighty de Cambridge ou Essé, où vous avez obtenu un diplôme en génie civil ainsi qu’un doctorat en économie. Vous êtes spécialiste des marchés de l’énergie, en particulier de l’électricité et au sein du groupe EDF? Vous êtes chef économiste et vous dirigez l’Université d’entreprise pour le management.

00:02:37
FB: Il est à noter Thomas Ollivier que vous avez collaboré avec pas moins de deux prix Nobel d’économie, dont Jean Tirole, qui a été récipiendaire de ce prix prestigieux en 2014. Et si je fais allusion à cela, c’est parce que Jean Tirole fait justement l’actualité. Le 23 juin dernier, en compagnie de son acolyte, l’ancien chef économiste du FMI Olivier Blanchard, il a remis au président de la République un rapport. Le bien nommé rapport Blanchard Tirole, qui a mobilisé la matière grise d’une commission internationale d’économistes pour plancher sur les grands défis économiques de notre monde. Post vide. Et il apparaît clairement, dans les conclusions de ce rapport, que la question climatique se trouve au cœur des enjeux de demain.

00:03:20
FB: Comme si on avait besoin de s’en convaincre davantage. Le lendemain même de la remise de ce rapport, soit le 24 juin, une tornade d’une puissance incroyable s’est abattue ici, en Europe, en République tchèque. Pour être plus exact, dévastant plusieurs villages sur son passage un peu plus loin de nous.

00:03:39
FB: Un autre phénomène spectaculaire, tout aussi inquiétant un dôme de chaleur qui s’est abattue sur le Canada et le nord ouest des États-Unis. La population suffoque avec un mercure qui atteint les 50 degrés. Alors, est ce que c’est pour faire face, finalement, à ce contexte qui est particulièrement anxiogène que le groupe EDF a désiré mettre en place ce cycle de conférences? Est ce que c’est bien cela?

00:04:03
TOL: Absolument. J’ai déjà enlevé le masque parce j’ai le droit.

00:04:06
FB: Autrement, vous allez suffoquent absolument.

00:04:11
TOL: Ces deux événements que vous mentionnez sont très importants parce que ils illustrent bien la situation. Le premier événement, c’est là, c’est la crise climatique, en particulier au Canada. La tornade qui s’est abattue en République tchèque, qui montre que la crise climatique est réelle, elle est aujourd’hui présente et ce n’est pas une élucubrations de chercheurs. Ce n’est pas quelque chose qui arrivera dans 100 ans, dans 200 ans.

00:04:34
TOL: C’est quelque chose qui est réel. Il y a une vraie urgence à prendre des mesures sur le climat.

00:04:40
TOL: Après, il y a le rapport Blanchard Tirole. Et qui a mobilisé effectivement de nombreux chercheurs. Beaucoup d’Américains, des Européens et ce qui est intéressant dans le rapport Blanchard Tirole, c’est bon. Ils ont fait des recommandations d’économistes, donc ils n’ont pas d’opinion sur le climat en soi, mais plutôt sur comment. Quelles sont les mesures qu’on peut mettre en oeuvre? Mais ce qui est intéressant, c’est pour moi. Ça a été la réception qui a eu lieu. Il y a des gens qui ont dit c’est super et des gens qui ont dit ça, c’est vraiment pas bien. C’est de l’économie désincarnée et je me dis si on est un citoyen, qu’on assiste à ces évènements, on sent bien qu’il y a un problème. On voit qu’il y a des solutions, mais on voit qu’il y a un gros débat autour des solutions, qu’il y a beaucoup de tempêtes, de tumulte, d’émotions et on est un peu désemparés.

00:05:24
TOL: Et quand on a fait ce cycle de conférences avec Alexandre Paieras, on a dit on va faire un cycle de conférences. On s’est dit Le but de l’opération, c’est de poser le débat et de dire il y a rappelé à tout le monde qui a un problème faire la pédagogie du problème et dire dans les solutions, il y a des points communs, il y a des idées, des objectifs qui sont partagées. Il y a quelques différences sur les moyens de faire la pédagogie des solutions et de l’expliquer de façon dépassionnée. Et c’est ça qu’on essaye de faire, de clarifier ce débat pour nos concitoyens. Parce qu’encore une fois, il a une vraie urgence. Et c’est pour ça qu’on est très heureux d’accueillir Jean-Marc étant l’un des pionniers en France de la réflexion sur le changement climatique. On ne le dira jamais assez. C’est un des premiers à avoir alerté, vulgarisée, qui a formé des générations d’ingénieurs, qui leur a expliqué l’urgence et l’importance. Et donc, on est très content de t’accueillir. Et même en basque.

00:06:16
FB: Bravo! Alors c’est vrai que je crois que vous vous connaissez bien l’un et l’autre. Je pense qu’il n’est pas faux de dire aussi que vous partagez certains points de vue, mais vous avez aussi certains points de désaccord. Je pense que ça devrait rendre les échanges d’autant plus intéressants.

00:06:32
FB: Voici le programme. Nous sommes ensemble pour environ une heure, une heure, quinze, sans doute une heure quinze, parce que ça va être passionnant. On va commencer par écouter religieusement notre invité qui va nous faire un exposé. Et puis nous laisserons échanger l’un et l’autre pour pouvoir creuser véritablement les sujets. Et enfin, on se tournera vers le public afin de répondre à ces questions. A mon avis, elles ne vont pas manquer d’être nombreuses. Elles seront sans doute consistantes et j’en profite d’ailleurs pour saluer nos amis du groupe des Alumni Force de planète qui nous font le plaisir de se joindre à nous et qui vont s’adonner à un exercice de réflexion collective. Donc, tout cela est très chouette.

00:07:09
FB: Tout au long de la conférence, dès maintenant, vous pouvez nous envoyer vos questions via le Tchad. C’est très, très simple, donc surtout, n’hésitez pas. Et puis tout à l’heure, et bien on se fera un plaisir d’essayer d’y répondre. Donc, c’est parti. Jean-Marc Jancovici, le micro-Etat. Vous avez environ 20, 25 minutes. On vous écoute, enlevez le masque,

00:07:32
JMC: je peux ne rien dire et juste savourer le fait que je n’ai plus de masque.

00:07:35
FB: Déjà, là, c’est pas mal.

00:07:38
JMC: Très bien. Donc, comme je suis en face d’un distingué économiste et qu’on va parler d’économie, je vais aussi vous parler d’économie. Mais je vais essayer de vous en parler essentiellement sans euros. Vous allez voir qu’on peut très bien parler d’économie de sans euros. Alors voilà, on est parti.

00:07:54
JMC: Je vais vous parler du système productif de la main. Et comme je l’ai dit, on va commencer par en parler sans euros si on prend la terre d’un point de vue en trop centré ou même pas d’un point de vue anthropos centré du reste, la Terre. C’est un grand ensemble qui comporte pour les hommes des ressources exploitables et ses ressources. Je vais les mettre dans deux morceaux distincts les ressources renouvelables et non renouvelables, renouvelables et non renouvelables. Il faut parler des échelles de temps parce que certaines choses sont renouvelables à des échelles de temps longues et non renouvelables, à des échelles de temps courtes. On va dire que renouvelable, c’est tout ce qui se renouvelle spontanément à l’échelle d’une vie d’homme ou moins non renouvelable. C’est ce qui se renouvelle, pas à l’échelle d’une vie d’homme ou qui mettent tellement longtemps que ce n’est pas la peine d’en parler.

00:08:42
JMC: Donc, voilà à quoi ressemble la terre avec les yeux dans les coins, comme aurait dit Coluche au moment où les hommes apparaissent et un ensemble de ressources. Alors hein, c’est quelque chose qu’il faut préciser, j’y reviendrai plus tard.

00:08:55
JMC: C’est que ces ressources ne nous ont rien coûté. La terre s’est formée, on n’a pas payé pour ça. On n’a pas payé pour la formation du Soleil 10 milliards d’années après le Big Bang. On n’a pas payé pour la première génération d’étoiles qui, à partir de seules protons, ont fait les 92 éléments du tableau de Mendeleïev. Donc, tous les éléments Kenton sur Terre. Ça, c’était gratuit.

00:09:14
JMC: On n’a pas payé pour l’apparition sur terre de continents, d’une atmosphère d’un océan de 30 millions d’espèces vivantes, de sols cultivables, etc.

00:09:21
JMC: Tout ça est gratuit. Gratuit.

00:09:24
JMC: Et puis on arrive là dedans. Et puis nous, on va faire. On va se mettre à avoir une activité productive. Alors, c’est quoi une activité productive du point de vue des hommes? Fin de l’humanité. C’est des ressources. Soit je consomme directement, soit je les transforme pour en faire autre chose que je trouve plus sympathique. Parce que c’est plus facile de ne pas faire des taches de jaune d’œuf sans sa cravate avec une fourchette qu’avec du minerai de fer. Je trouve que c’est bien de transformer du minerai de fer en fourchette.

00:09:47
JMC: Alors du point de vue des hommes, la production économique ou pas, du reste, elle se décrit en termes de flux d’une manière très simple je prends dans les stocks de ressources, je transforme et j’en fais autre chose qui a plus d’intérêt pour moi. Dans les stocks de ressources renouvelables au début de notre espèce, nous sommes peu nombreux. Notre prélèvement unitaire est faible, donc on ne change pas le niveau des stocks renouvelables. Le stock de poissons n’est pas modifié par l’activité des premiers pêcheurs sur terre. Ça ne change pas grand chose. Par contre, dès lors qu’on table dans les stocks de silex, les stocks de silex se mettent à baisser. Alors ils baissent de manière imperceptible au début, mais quand même. Milesse.

00:10:20
JMC: Et puis, à un moment, on va découvrir et longuement revenir là dessus. Ce qu’on appelle aujourd’hui l’énergie. Et vous allez voir que l’énergie est un amplificateur de la possibilité de prélever et de transformer.

00:10:31
JMC: C’est ça, l’énergie. C’est un amplificateur de cette possibilité.

00:10:34
JMC: Une humanité avec de l’énergie, toutes choses égales par ailleurs, prélève et transforme beaucoup plus qu’une humanité sans énergie. Mais encore une fois, j’y reviendrai plus tard. Tout cela est très bien.

00:10:44
JMC: Et puis, un jour, on découvre qu’il y a une partie de notre production qu’on peut mettre de côté pour augmenter la production future. C’est ce qu’on appelle le capital. Donc, en gros, c’est de la production qui se détruit, pas quand on s’en sert. Et donc, cela permet d’augmenter encore une fois la production future.

00:10:59
JMC: Alors on trouve ça très bien, on lit la Bible, on croit et on se multiplient. Et plus on est nombreux, plus on va prélever et transformer et voir de choses transformer. On a évidemment des ressources naturelles vierges restantes.

00:11:11
JMC: Et puis, à un moment, on va devenir tellement nombreux et tellement productifs que non seulement on a baissé les ressources non non renouvelables, les minerais, le pétrole, mais on se met également à baisser les stocks qui auparavant, étaient renouvelables. Le stock de poissons a baissé. Par exemple, le stock de forêts a baissé, donc un certain nombre de stocks qui, avant de se renouveler au sol, se mettent à baisser.

00:11:34
JMC: Et puis, dans cette activité débridée, on crée des sous produits, par exemple quand je transforme un silex pour en faire une pierre taillée. J’ai des sous produits et des éclats de silex dont je ne fais rien du reste, parce que c’est des trucs que j’ai obtenu en taille, en silex.

00:11:49
JMC: Cela s’appelle un déchet. Alors des éclats de silex, c’est pas un déchet que la nature, comme on dit, retrouve extrêmement gênant. Ça reste la terre et on va dire que ça n’empêche personne de vivre. Mais quand on devient très nombreux et très transformé en unitairement, la quantité de choses indésirables associées à notre production devient extrêmement importante et elle va avoir pour effet de dégrader la qualité des actifs résiduels. Donc, si j’ai énormément de tanneries, veux bazard énormément de trucs dans les rivières et ça dégrade la qualité des rivières restantes.

00:12:19
JMC: Voilà donc ça, c’est la représentation de l’activité physique de l’humanité. C’est ça fait notre système économique. Je prends, je transforme. Et au passage de cette transformation, je crée des choses que je n’ai pas demandées, mais qui sont là quand même, qu’on appelle la pollution et qui vont venir dégrader les actifs résiduels.

00:12:38
JMC: La convention que nous avons choisi d’adopter il y a longtemps et que nous avons commencé à théoriser il y a longtemps, c’est que quand on va parler économie dans ce système là, on va juste s’intéresser aux deux flux que je viens de cerclée en rouge, c’est à dire là où on va avoir des hommes qui sont intervenus dans le processus qu’on va payer pour faire quelque chose ou pour se défaire de quelque chose, donc des salaires et des rentes, et donc la totalité de ce qu’on paye quand on achète un objet, ce n’est pas la matière de l’objet que Mère Nature nous a donné gratuitement. C’est les gens qui ont qui sont intervenus dans le processus entre la mine et l’objet et à qui on a payé soit des salaires, soit des rentes.

00:13:20
JMC: Donc, le prix ou le PIB est un agrégat de prix. Bien, ça n’est rien d’autre qu’un flux qui est la contrepartie économique de notre flux de transformation, donc de destruction de ressources naturelles qui va de la gauche vers la droite.

00:13:36
JMC: Ce n’est pas une comptabilité actif passif, donc ce n’est pas parce que le PIB augmente qu’on peut dire qu’on s’enrichit. Pour dire qu’on s’enrichit. Il faudrait que la valeur conventionnelle additionnelle de ce que nous avons créée soit supérieure à la valeur conventionnelle à négative. Cette fois ci, de ce que nous avons détruit et donc dans une vision actif passif. Le jour où la valeur marginale de la dernière voiture qu’on a construite est inférieure à la valeur marginale des derniers stocks de minerai de fer et de biodiversité qu’on a détruit pour construire cette voiture, on s’arrête de faire des voitures et on vit à Rafter comme dans les comptes avec les voitures qui existent déjà.

00:14:11
JMC: Évidemment, ce n’est pas du tout ça que nous avons pris comme système. En fait, le système qu’on a pris, il postule. Et vous allez voir plus tard que ces mêmes explicit que nous nous trouvons dans un monde infini dans lequel on fait le moins de gauche, c’est à dire la dotation aux amortissements et Epsylon, quelle que soit l’activité de transformation. Et donc, c’est juste pas la peine de s’en occuper.

00:14:30
JMC: Voilà, en fait le drame initial. C’est que l’on continue à fonctionner aujourd’hui avec une approximation au premier ordre qui date date d’il y a deux siècles, à une époque où notre activité de transformation était 100 fois plus petite qu’aujourd’hui.

00:14:40
JMC: Alors, dans cette affaire, il y a l’énergie dont j’ai dit tout à l’heure qu’elle était un démultiplicateur de notre activité l’énergie. Vous savez, il y a un ministre pour ça. Je suis pas sûr qu’il connaisse la définition de l’énergie. Du reste, je vais pas vous la donner aujourd’hui, mais je vais vous dire une chose je vais vous résumer l’énergie à ce que c’est vraiment l’énergie, c’est ça. l’Énergie, en fait, c’est ce qui alimente l’exosquelette que nous nous sommes créés. Sauf qu’il n’a pas cette tête là. Ce n’est pas celui là qu’on enfile le matin quand on part au boulot. L’exosquelette que nous nous sommes créés, voilà la tête qu’il a vraiment.

00:15:06
JMC: C’est le parc de machines que nous avons installé sur Terre et qui travaillent à notre place. Car les vêtements que vous portez ont été fabriqués, transportés, cousus, taillés, stockés par des machines. La tartine beurrée que vous avez mangé ce matin, elle est faite de blé qui a été semé, récolté, transformé, transporté par des machines. Les vaches ont été traites par des machines, etc.

00:15:28
JMC: Nous vivons dans un monde de machines et en fait, l’énergie, c’est la nourriture de ces machines. Ces machines en question nous ont constitué un costume H qui est particulièrement puissant parce qu’on va voir quelques machines que nous avons autour de nous.

00:15:41
JMC: Alors si on prend une première machine qui est nous mêmes, on n’est pas une machine très, très puissante. Vous voyez que si je prends quelqu’un, par exemple, qui fait 4000 mètres de dénivelé dans la journée, pas mal 4000 mètres de dénivelé dans la journée à Chamonix, au sommet du mont Blanc ou pour ceux qui veulent rester à Paris, c’est faire 12 fois la tour Eiffel dans la journée, avec les jambes, avec l’ascenseur. Vous voyez qu’à la fin de la journée, quand même, on est content de manger sa soupe aux haricots. Et si vous faites ce genre d’effort, vous allez développer un kilowattheure d’énergie mécanique dans la journée. Si vous faites ça sur Deezer. Vos jambes auront une puissance moyenne de 100 watts. Vous êtes puissant comme une grosse ampoule. A partir du moment où vous faites ce genre d’exercice physique quand même assez intense,

00:16:21
JMC: alors maintenant, je prends un objet aussi anodin qu’un mixeur à soupe, un truc qu’on met dans les poireaux là, l’hiver ou l’été. Du reste, on peut faire ça avec des soupes de courgettes. C’est très bon, mais ça donne dans la casserole. Ça fait vite, bien. Au moment où vous appuyez sur le bouton, vous avez instantanément quatre cyclistes qui sortent de la lampe. Là, vous avez une lampe ager livre de cuisine, quatre cyclistes qui sortent de la lampe et qui se mettent à pédaler pour vous. Parce que la puissance du moteur de votre petit mixeur a surpris édicules. C’est 400 watts, c’est à dire quatre fois des paires de jambes surentraînés qui sont capables de faire le Mont-Blanc dans la journée.

00:16:51
JMC: Si vous passez l’aspirateur, si vous avez de la soupe partout à ce moment, c’est dix cyclistes qui apparaissent instantanément au moment où vous appuyez sur le bouton marche arrêt. Ils sortent du néant, ils se mettent à pédaler pour vous. Puis, quand vous appuyez sur le bouton marche arrêt, ils retournent dans leur boîte. Dans leur lampe et ils disparaissent.

00:17:06
JMC: Vous montez un ascenseur comme il y en a juste à côté d’ici. À ce moment, c’est 50 cyclistes qui sortent du néant et ils se mettent à pédaler pour que l’ascenseur se mette en mouvement. Soyez un peu plus sérieux.

00:17:16
JMC: Le tracteur dont je parlais tout à l’heure qui vous a permis de manger votre tartine. Lui, il est puissant comme 600 paires de jambes ou 90 chevaux attelés. Donc, bien évidemment, ça coûte un peu moins cher. C’est pour ça qu’on l’a fait.

00:17:26
JMC: Prenons un engin de travaux publics. Lui, il est puissant, comme des milliers de paires de bras. Et c’est notamment grâce à ces engins qu’aujourd’hui, avec un salaire du bas de l’échelle, on peut quand même s’acheter un logement avec quelques années de salaire. Voilà truc qui était juste impensable avant l’apparition de ces machines.

00:17:43
JMC: Un camion. Toute la société dépend des camions. Aujourd’hui, 100 camions. Les villes meurent de faim. Et bien, ils pédalent comme des milliers de fois. Les jambes de son conducteur.

00:17:51
JMC: Et enfin, si je prends un laminoir industriel comme il y en a un à Dunkerque ou à Fos sur Mer pour remplacer les deux laminoirs que nous avons à Dunkerque et à Fos sur Mer par des gens qui tapent sur la tôle pour développer une puissance équivalente, je devrais prendre la totalité des salariés du privé. En France, la totalité des salariés du privé en France ont une puissance 20 millions de personnes sont juste capables de remplacer deux laminoirs industriels qui, à l’heure où je vous parle, sont chacun pilotés par une personne. Une personne a plus de monde dans le laminoir parce qu’il faut la maintenance des machines, c’est une personne,

00:18:26
JMC: donc les machines que nous avons mis sur terre. En fait, ce sont elles qui travaillent pour nous et l’énergie, c’est leur nourriture, c’est leur croquettes pour machines. C’est pour cela que c’est si important dans le système productif que nous avons bâti. Et elles ont permis ces machines de démultiplier la puissance musculaire de l’humanité par plusieurs centaines.

00:18:43
JMC: Alors, je vais vous le dire maintenant d’une façon très économique. Si nous n’avions pas les machines et donc l’énergie permettant d’alimenter ces machines sur Terre, le PIB mondial serait divisé par 100 à 200. Voilà, c’est ça que ça veut dire en termes clairs.

00:18:59
JMC: Alors, on peut voir la conséquence de ce que je viens de vous raconter sur ce graphique que je vous montre un graphique que j’avais commencé par faire par curiosité, il y a une dizaine d’années. Quand j’ai vu le résultat, je me suis dit que c’est frappant. En fait, ce graphique qui vous donne année après année en partant de 1965 en bas à gauche et en allant jusqu’à 2019 en haut à droite pour chaque année, l’énergie sur l’axe horizontal, l’énergie mondiale utilisée et le PIB mondial sur l’axe vertical. Vous voyez que nous avons affaire à une droite. En fait, l’énergie, c’est le parc de machines en service. Donc, plus on met de machines en service, plus AddÉnergie et plus on produit d’où?

00:19:32
JMC: Certains économistes qui théorise la fin du travail à la fin du travail tant que les machines bossent pour nous, le jour où il y a plus assez d’énergie, je vous assure qu’on va retrouver le travail et donc en faire une société sobre en énergie. Ce n’est pas une société dans laquelle c’est la fin du travail et la seule question est de savoir où on part en vacances. Une société sobre en énergie est une société dans laquelle on recommencera à transpirer.

00:19:52
JMC: Cette énergie essentiellement fossile. Vous avez ici la quantité d’énergie qu’on utilise sur Terre depuis un siècle et demi. On pas nous les machines, et vous voyez que les énergies, historiquement, se sont empilées les unes sur les autres. Elles ne sont pas du tout substituées. Au bois est venu s’ajouter le charbon noir en bas. Puis est venu s’ajouter le pétrole range au dessus. Puis est venu s’ajouter le gaz, etc. Et les nouvelles énergies renouvelables, là qui excite tant les journalistes, les politiques et parfois EDF que vous avez tout en haut. Là, c’est le petit machin rose. Vous voyez que ça ne change strictement rien aux ordres de grandeur pour le moment. Alors on pourra discuter tout à l’heure de savoir si un jour, ça va complètement changer la donne. J’ai quelques doutes. Je pourrais expliquer pourquoi

00:20:24
JMC: l’essentiel des énergies aujourd’hui utilisées sur Terre sont des énergies fossiles, tout simplement parce que c’est des fossiles. Et ça fait 50 ans que c’est des énergies fossiles qui composent 80 du mix mondial.

00:20:34
JMC: Du reste, ici, je vous propose un autre graphique que j’ai fait, dans lequel vous avez de 1965 à 2019. Je suis désolé. J’ai parmi les dates en abscisse la quantité d’énergie qu’on utilise et en ordonnées les émissions de CO2 dues à l’usage de l’énergie.

00:20:47
JMC: Vous voyez, on a rien décarboné du tout. C’est une droite absolument parfaite. Donc, nous n’avons rien décarbonées en matière d’énergie depuis 50 ou 60 ans. Et ni la croissance du nucléaire dans le monde, ni la croissance de l’hydro électricité, ni la croissance des renouvelables n’ont changer fondamentalement le fait que les énergies fossiles sont restées à 80%.

00:21:07
JMC: Alors, comme l’essentiel de l’énergie fossile, vous avez ici le drame des négociations climat qui est que plus il y a de ces eaux de et de P.I.B. Plus il y a de P.I.B. De CO2. En fait, c’est un rapport de cause à conséquence. Plus il y a de machines, plus y’a de P.I.B. Mais comme les machines consomme de l’énergie fossile plus de machines de CO2.

00:21:22
JMC: Donc aujourd’hui, on ne sait pas faire plus de P.I.B. Avec moins de CO2. Et mon ma conclusion, après avoir bien regardé la physique sous jacente de l’économie, c’est qu’on ne saura jamais faire dans les bons ordres de grandeur pour garder la civilisation industrielle qu’on a aujourd’hui en allant à la neutralité carbone.

00:21:36
JMC: Donc, en gros, aller à la neutralité carbone, c’est accepter une récession structurelle. C’est carrément ça.

00:21:43
JMC: Alors là dedans, je vais revenir à l’économie. Vous avez ici le prédécesseur de M. Tirole qui a théorisé l’économie à une époque où le prix Nobel n’existait pas, qui, je le rappelle, n’est pas un prix Nobel. C’est le prix de la Banque de Suède. C’est une OPA sur la Fondation Nobel. Nobel n’avait pas prévu de prix pour l’économie. Il faudrait lui demander pourquoi. C’est un peu difficile. Il est mort, mais il n’avait pas prévu de prix. Et c’est la Banque de Suède à qui, dans les années 60, a dit non, mais ça serait quand même bien. On doit en faire aussi pour l’économie, mais c’est le prix de la Banque de Suède en sciences économiques en mémoire d’Alfred Nobel.

00:22:16
JMC: Donc, notre ami Jean-Baptiste Say, grand ancêtre des Béghin du SED Béghin-Say, c’est le même à une époque où on théorise l’économie classique, dit Ben voilà, quand on va regarder ce qui compte dans la production économique, les ressources naturelles, ça va valoir zéro.

00:22:34
JMC: Alors c’est la conséquence de ce que j’ai dit tout à l’heure. À une époque, il y a deux siècles, il y a beaucoup moins de gens qu’aujourd’hui. On est beaucoup moins productif parce qu’on a beaucoup moins de machines. En fait, il y a beaucoup moins de machines en service et au premier ordre, on peut considérer que le monde est presque infini. Face à la modestie de l’humanité, les prélèvements qu’on peut faire de ressources, ça ne change pas grand chose aux stocks résiduels de ressources.

00:22:51
JMC: Donc, vous le savez, pour tous ceux d’entre vous qui ont fait des maths une variation finie dans un stock infini, c’est une variation relative, nulle. Donc, on se dit on va pas s’emmerder à mettre des zéros partout dans les équations. Restons à zéro.

00:23:04
JMC: Sauf que ça nous a amenés à théoriser le système de façon permanente comme suit le système productif a donc deux facteurs de production les gens qui travaillent et le capital. Et si jamais deux facteurs de production, eh bien le supermarché est rempli et les retraites sont payées.

00:23:19
JMC: Alors, au regard de l’économie physique que je viens de vous exposer. Moi, je dis oui, peut être. Sauf que pour remplir le supermarché, il faut les ressources qui vont permettre de faire les produits qui permettent de remplir le supermarché. Et ça, c’est vrai, même quand on est dans les services. Moi, je suis dans les services, même des services totalement inutiles. Je suis consultant dans mes services inutiles. J’ai besoin d’un ordinateur et des ressources tout à fait matériel. J’ai besoin d’un bureau, des ressources tout à fait matériel. J’ai besoin de le transporter dans un serveur est fait en ressources tout à fait matériel. J’ai besoin d’un stylo qui est tout à fait matériel. J’ai besoin d’un réseau de télécoms qui est tout à fait matériel et j’ai besoin de clients qui eux mêmes sont dans des flux tout à fait matériel.

00:23:54
JMC: Donc, l’idée qu’on pourrait avoir une économie tout à fait désincarnée au milieu du vide intersidéral, ça ne marche pas, même pour les services. Donc on a besoin de ressources et on a besoin d’une capacité de transformation de ces ressources. Ça s’appelle le travail du reste. En physique, le travail, c’est la transformation. Et comme je l’ai évoqué juste avant ce travail, il est fait un peu par nous et essentiellement par les machines.

00:24:15
JMC: Alors là, il y a également du capital dans cette représentation. Le capital, c’est une transformation. Je ne l’ai pas mis là. C’est une transformation de ressources naturelles comme le reste. Sauf que ça se détruit. Pas quand on s’en sert.

00:24:25
JMC: Alors qu’on voit bien dans cette représentation, c’est que si a un moment, pour une raison voulue changement climatique ou subi, les réservoirs sont vides. Je n’ai plus assez d’énergie fossile. Et bien, même si j’ai des gens prêts à travailler et des banquiers très complaisants, et du reste, on a les deux en ce moment de façon surnuméraire.

00:24:42
JMC: Il y a du pognon partout, on ne sait plus quoi en faire. Donc, la valeur de tout et n’importe quoi augmente jusqu’à des plafonds totalement déraisonnables. Les entreprises, les mètres carrés parisiens, les oeuvres d’art. Pourquoi faire tout ce que vous voulez?

00:24:54
JMC: Et puis, on a des gens surnuméraires partout puisque du chômage partout. Donc on manque pas des deux facteurs de production qui sont dans la théorie économique. Par contre, on commence à avoir des petits stress sur l’énergie et ça, ça fait des stress sur le PIB. Et il suffit pas de mettre plus de gens au travail pour augmenter le PIB. Ça ne marchera pas comme ça.

00:25:09
JMC: Et si on a un stress sur les ressources, par exemple, si vous êtes dans la pêche, il y a plus de poissons à pêcher, pouvez avoir plein d’énergie, plein de bateaux pleins de marins et un crédit maritime très coopératif. Pardon pour le jeu de mot, ce n’est pas pour autant que vous pêcher plus de poisson, donc il y aura moins de choses à pêcher.

00:25:22
JMC: Voilà donc ce qu’il faut bien voir, c’est que dans cette représentation de l’économie physique. En fait, si on a une limite très forte sur l’énergie, encore une fois qu’on se l’impose pour des raisons climatiques, on va évidemment discuter, j’imagine, de la possibilité de passer du fossile au décarbonés. Mon avis là dessus, je pense que ça ne sera pas un point dans les délais. Si on a une contrainte, soit pour des raisons climatiques, soit pour des raisons géologiques,

00:25:48
JMC: il se trouve que, par exemple, sur le pétrole conventionnel, la production a commencé à décliner depuis 2008. Et ce n’est pas une affaire de climat. C’est juste qu’il y en a assez.

00:25:56
JMC: Eh bien, vous aurez un stress sur le PIB et le PIB. Vrai, c’est à dire la vraie production de biens et de services. Là aussi, on pourra peut être en discuter. Aujourd’hui, une partie du PIB est devenue du . C’est de l’inflation d’actifs non corrigé dans les calculs parce qu’on corrige l’inflation des biens courants. Mais on ne corrige pas l’inflation des actifs quand on fait les calculs du PIB. Donc, si le prix de l’immobilier double, ça fait du PIB virtuel qui est réel dans la croissance du PIB, mais qui est totalement virtuel puisque ça ne fait pas plus de mètre carré pour les gens.

00:26:22
JMC: Alors que je suis en train de vous dire, avait été théorisée il y a 50 ans déjà par une équipe de dynamisme des systèmes issus du même prestigieux établissement que Thomas Olivier, c’est à dire le même MIT. Et il avait regardé comment pouvait évoluer un certain nombre d’indicateurs macroscopiques caractérisant l’humanité sur une planète finie.

00:26:41
JMC: Alors les indicateurs caractéristiques qu’il avait regardé, c’était la population sur ce graphique. Vous voyez ici en vert, la quantité de nourriture produite que vous voyez ici, en violet, la production de biens industriels que vous voyez ici en rouge. La pollution, c’est à dire les sous produits indésirables que je vous écris. Ça, c’est les ressources restantes.

00:27:01
JMC: Alors, nos amis disent Au début, j’ai un stock de départ de ressources. La population démarre en 1900, la population n’est pas très élevée, produit, et la nourriture, je n’en produit pas énormément puisqu’il n’y avait pas énormément de gens à nourrir, etc. Alors que le rapport était de 12 ans.

00:27:13
JMC: Qu’est ce qui se passe alors? Il se passe qu’au début, tout va bien. Vous voyez, la population augmente. La nourriture qu’on produit augmente, la production industrielle augmente. La pollution ne vend pas très, très vite et les ressources ne baissent pas très, très vite. Donc, tout va bien. Et au moment où sort le rapport dit du Club de Rome, non seulement tout va bien, mais il avait théorisé que tout continuerait à aller bien pour encore un certain temps, c’est à dire qu’on continuerait à avoir pas mal de ressources, qu’on continuerait, etc. Et que la pollution serait pas encore dramatique.

00:27:41
JMC: C’est après qu’on rigole. Donc ils nous disent après, vous pouvez retourner le problème dans tous les sens. Vous pouvez retourner le problème dans tous les sens. Tant qu’on cherche à faire croître la production économique, c’est à dire la produit, le prélèvement de ressources. Pour la transformer en autre chose, quelque part dans le courant du 21ème siècle, le système s’effondre sur lui même, alors un effondrement, c’est quoi? C’est que vous êtes au delà de la capacité de relaxation du système. Il ne peut plus revenir en arrière après que vous ayez franchi des seuils physiques. Ça aussi, c’est des trucs qui sont bien connus en physique

00:28:08
JMC: et à ce moment, quoi que vous fassiez, de toute façon, la population diminue de façon drastique. La production industrielle diminue de façon drastique. La quantité de nourriture qu’on peut produire sur Terre diminue de façon drastique.

00:28:19
JMC: Alors, si vous avez plus de ressources, vous en consommerait plus vous êtes plus tranquille sur les ressources, mais du coup, vous aurez plus. Donc c’est la pollution qui vous avez changé les conditions initiales dans tous les sens et dans tous les cas de figure, il est retombé sur la même conclusion dans le courant du 21ème siècle, le système s’effondre.

00:28:34
JMC: Alors, Shift Project finance la représentation par là, on va essayer pour les prochaines présidentielles de sortir un programme économique qui n’avait pas besoin de croissance. Alors, plus exactement, on dit on va sortir un programme économique qui est à l’accord de Paris de vrai.

00:28:46
JMC: Et l’accord de Paris, c’est on devient neutre en carbone en l’espace de quelques décennies. Alors si vous êtes, si vous voulez voir ce que ça représente, ça veut dire en particulier que les émissions sont divisées par 3 d’ici à ce que mes enfants et mon âge dans les 30 ans qui viennent. Cela veut dire qu’elle doit baisser de 5% par an tous les ans à partir dès maintenant. 5% c’est ce qu’elles ont fait en 2020 à cause du Covide, donc tous les ans il faut faire la même chose et cela veut dire en particulier à cause du fait que l’énergie fossile qui est la pièce maîtresse de la civilisation thermo industrielle que nous avons créé. Cela veut dire que nous sommes en récession structurelle. C’est ça que ça veut dire.

00:29:21
JMC: Donc nous, on va dire va très bien. On va essayer de voir à quoi ça ressemble, de continuer à avoir des jobs, de l’espoir et comment on organise nos activités dans un monde où la sobriété devient le maître mot. Comment on fait pour organiser ce truc là et s’en sortir le moins mal possible?

00:29:37
JMC: Donc, c’est exactement ce travail que nous avons commencé à faire. Il ne sera probablement jamais parfait, mais c’est une base de discussion qu’on va essayer de poser sur la table à partir de septembre pour être capable d’engager un débat que nous espérons adultes sur le problème que je viens d’évoquer sans se raconter d’histoire et avec une approche qui est bouclée. C’est à dire qu’aujourd’hui, tous les gens qui vous racontent qu’on va s’en sortir, par exemple avec les renouvelables. En fait, ils font des trucs pas bouclés. C’est de la croissance verte, c’est à dire que le truc se marche sur les pieds avec les hypothèses de départ. Voilà.

00:30:08
FB: Je remercie. Merci beaucoup, cher Jean-Marc Jancovici, pour ce brillant exposé. C’est vrai que l’originalité de votre vision, c’est vraiment cette approche avec un critère principal, celui d’énergie, qui vous permet de revisiter toute l’évolution civilisationnelle. C’est vraiment ça. Et donc, du coup, à bien des égards, c’est très intéressant parce que ça nourrit notre voilà notre vision par rapport aux enjeux d’aujourd’hui et en même temps, ça fait froid dans le dos. Parce que, comme vous le dites, on a beau prendre les choses dans tous les sens, on se dit bon, voilà, il y a une espèce d’effondrement. D’ailleurs, on se demande si, finalement, vous faites partie de ceux qui se disent collapsologue, mais on va voir. Vous allez nous dire parce que je pense qu’il y en a un à ma droite qui doit brûler d’impatience de réagir avec le masque, déjà d’enlever le masque. C’est Thomas Olivier Léautier. Qu’est ce que vous pensez de ce diagnostic de Jean-Marc Jancovici?

00:31:03
TOL: D’abord, je trouve que l’exposé sur l’histoire de l’économie est vraiment très bien fait et je trouve que c’est quelque chose de très clair, de très pédagogique. Et je suis d’accord sur tout, sauf sur la partie décroissance future.

00:31:18
TOL: C’est à dire que effectivement, l’énergie a été un entrant majeur dans la croissance économique depuis, depuis le 18ème siècle, depuis le début du 19ème siècle. Effectivement, l’énergie est socialement carbonée. C’était d’abord du charbon, puis maintenant, c’est du pétrole et du gaz.

00:31:31
TOL: En revanche, quand nous regardons le futur, quand nous prenons en compte l’urgence climatique et l’impératif de décarboner notre économie, quand on fait les calculs et les calculs, ce n’est pas moi qui l’ai fait. C’est l’ensemble des chercheurs d’EDF. C’est l’Etat d’organisation, c’est la Banque mondiale, c’est l’agence internationale, l’énergie. Et là, je parle que de la lapartie physique, c’est à dire les joules.

00:31:56
TOL: Quand on fait les calculs, on se rend compte qu’on peut. Il faut s’y faire, il faut s’y coller. Mais qu’on peut décarboner notre système énergétique. Alors ce qu’il faut faire, c’est tout le monde tombe à peu près sur les mêmes choses.

00:32:07
TOL: Et puis, quand on lisez ce que prépare le Shift Project, on retrouve à peu près sur les mêmes choses fofa de l’efficacité énergétique. Il faut décarboner le transport dans les véhicules électriques. Il faut décarboner le chauffage dans des pompes à chaleur plutôt que des chauffages au fioul. Il faut électrifier pendant le transport électrifié, le chauffage. Et puis après, il faut décarboner la production d’électricité. Et là, alors, il y a un mix nucléaire renouvelable dans le renouvelable à plusieurs sources possibles. Une fois qu’on a fait tout ça, il en reste un peu. Et après, on fait de l’hydrogène, du carbone, on le capture et stockage CCPS quand on est tous à bout à bout, juste en regardant les exagerer. On arrive à produire suffisamment d’énergie pour éviter l’effondrement, c’est à dire pour maintenir le bienêtre à un niveau à peu près acceptable et c’est cette conviction qui nous anime, nous, EDF, puisqu’on est comme les ingénieurs, on opère des actifs énergétiques, mais pas les actifs industriels. On dit ben oui, quand on regarde où on dit, on est capable de les concevoir et capables de les opérer.

00:33:07
TOL: Il faut changer complètement, mais dans Produits technologiques, nous, on y croit. D’ailleurs, c’est ce qu’on reflète dans notre raison d’être. Et dire à concilier la préservation de la planète, le développement et le bien être à travers les énergies décarbonées. Ça, c’est le premier point.

00:33:20
TOL: Après, quand on regarde les coûts de cette affaire, les coûts, effectivement, ça et je suis d’accord avec toi, c’est toujours un peu plus compliqué parce que des hypothèses, on tombe sur 2,5 4% du PIB, donc c’est quelque chose qu’on peut faire. Jusque là, on est assez confiant.

00:33:31
TOL: Là, on est moins confiant. Je pense qu’on se rejoint là dessus. C’est sur la capacité collective à se mettre en mouvement dans le temps qui nous est imparti. Quand on regarde depuis la COP 21, qui a été un grand moment, les émissions ont continué à augmenter et elles ont pas vraiment diminué. Elles ont continué à augmenter depuis la COP 21.

00:33:53
TOL: On entend beaucoup de déclarations, on entend beaucoup de promesses, mais on ne voit pas beaucoup d’actions en nous. Il nous semble qu’il y a un vrai besoin de , c’est à dire que la société civile, l’ensemble de la société, s’empare du problème. Et poussent pour des politiques actives vigoureuses de réduction des émissions de CO2 avec les technologies.

00:34:16
TOL: Pour nous, c’est plutôt un enjeu politique au sens vie de la cité, au sens de conscience collective qu’un l’enjeu technologique ou un enjeu économique. Il y a une autre chose qui nous inquiète, c’est l’impact plus global sur la biodiversité, parce que là, on vient de parler du carbone. Ce stock fini de carbone dont on dispose de CO2 pour être plus précis. Mais au delà du carbone, l’impact qu’on a sur la pollution de l’air, il y a l’impact sur les rivières. Il y a un impact sur les azot.

00:34:41
TOL: Il y a un ensemble d’impacts sur la biodiversité en général qu’on a sur l’environnement qui nous est notre planète et qui sont l’ensemble des ressources renouvelables et non renouvelables. Je trouve que la distinction a été bien vue, celle de Jean-Marc. Et là, on est pas vraiment confiant sur le fait qu’on va savoir s’emparer de ce problème.

00:35:00
TOL: Mais sur la partie énergie, on est confiant qu’on a la technologie, que c’est accessible économiquement. L’enjeu tel qu’on le voit nous, c’est la prise de conscience politique. D’où ce cycle de conférences pour échanger et partager, pour discuter de ces sujets là.

00:35:15
FB: Jean-Marc, vous qui effectivement travaillez maintenant avec le Shift Project et avec cette communauté des shifter, vous travaillez donc ce plan de transformation de l’économie française en faveur du climat et de la résilience? Ça veut dire que vous essayez effectivement d’apporter des solutions. Est ce que vous commencez à rejoindre cette vision sur le fait que c’est possible de décarboner l’énergie ?

00:35:40
JMC: Si aujourd’hui, on avait la même quantité d’énergie totalement décarbonée, il y a plein de problèmes dont on serait toujours pas débarrassés pour autant. On continue à empiéter sur les espaces naturels. On continue à manger. On est 8 milliards d’individus mangeant trop de viande, on déforeste. 40% des émissions de gaz à effet de serre. Ça ne vient pas de l’énergie, ça vient de l’agriculture, de la déforestation et d’autres procédés. Si tous les bateaux étaient nucléaires, on pêche quand même trop.

00:36:07
JMC: Donc, il y a une pression humaine sur l’environnement qui ne se limite pas à la question du CO2. Par contre, elle est au premier rang ramenée à la quantité d’énergie qu’on utilise cette pression humaine. Donc, le fait que l’énergie soit décarbonée en restant identique en volume, ça ne règle pas tous nos problèmes. Donc, on est obligé de la baisser aussi.

00:36:27
FB: Ce qui montre aussi….

00:36:29
JMC: Si l’on baisse l’énergie, on baisse la quantité de machines en fonctionnement et donc on baisse le PIB. Voit pas comment on peut faire autrement.

00:36:37
JMC: Dans les scénarios de place que j’ai regardé, il y en a pas un qui soit bouclé, c’est à dire le scénario de AIE, de l’Agence internationale de l’énergie, par exemple. Il repose sur un certain nombre d’hypothèses qui me semble relever du conte de fées.

00:36:51
JMC: La première hypothèse est qu’on y verrait un quadruplement de l’efficacité énergétique de l’économie overnight sur un siècle on n’a jamais fait mieux que 1% par an en tendance longue et où il passa 4 5%. On ne sait pas comment dans un tableur, c’est très facile de faire ce moi. Je sais faire ça aussi. Dans la vraie vie, c’est une autre paire de manches.

00:37:10
JMC: La deuxième chose, c’est que l’on continue à utiliser des fossiles et on fait de la capture et séquestration du carbone partout pour donner un ordre de grandeur, même si on est un peu technique aujourd’hui.

00:37:20
JMC: La masse conjuguée de pétrole et de gaz qu’on extrait de terre tous les ans, c’est 7 milliards de tonnes, 4 milliards de tonnes de pétrole, 3 milliards de tonnes de gaz. Les scénarios de l’Agence internationale de l’énergie qui nous permet de tenir sous les 2 degrés pour conserver la croissance. On conserve plein d’énergie fossile, mais on capture et la quantité de CO2 qu’on capture pour remettre sous sol dans 30 ans. En 30 ans, pas loin, ça serait 9 milliards de tonnes par an, c’est à dire qu’on ferait plus que doubler la taille du secteur, Oil Gass, juste pour remettre sous terre un produit qui, aujourd’hui, n’a strictement aucune valeur commerciale.

00:37:56
JMC: Pas une seconde. Un truc comme ça ne va arriver.

00:37:59
JMC: La quantité de métal qu’il faudrait produire pour faire les voitures électriques et les éoliennes et les panneaux solaires qu’il y a dans le scénario en question suppose de multiplier la production de nickel par 20 en 20 ans. Je pense qu’ils seraient ravis. Mais j’ai quelques doutes sur le fait qu’on va y arriver

00:38:15
JMC: et supposerait de multiplier la production de cuivre par 3 en 20 ans. C’est pareil. J’ai quelques doutes sur le fait qu’on va y arriver. Etc. Etc.

00:38:23
JMC: Donc, en fait, le scénario en question est absolument pas bouclé. Et aujourd’hui, je n’ai jamais vu un scénario de croissance verte bouclée. Pas un.

00:38:33
JMC: Donc, plutôt que de prendre un pari qui a toutes les chances de se réaliser au Shift Project, on a dit nous, on va prendre le pari que l’on va fonctionner dans un monde sans croissance puisqu’il y en a. Je pense qu’on saura quoi faire alors que si on prend le pari qu’il y en aura et qu’il y en a pas là, on est quand même un peu coincé parce qu’on se met dans une situation dans laquelle la marmite sociale explose.

00:38:55
JMC: Donc, la façon dont on s’y prend, c’est qu’on raisonne par secteur. On va raisonner physique, c’est à dire qu’on va raisonner ressources. On va raisonner compétences, c’est à dire gens dont on va s’occuper des gens et des ressources.

00:39:10
JMC: Et l’économie deviendra un terme de bouclage. C’est à dire qu’une fois qu’on sait ce que doivent faire les gens et avec quelles ressources, on mettra des euros derrière en disant voilà ce que ça peut représenter en termes d’euros.

00:39:19
JMC: Mais à la limite, on s’en fout. Si il faut passer des voitures à pétrole aux vélos électriques, c’est ça qu’il faut faire après que le vélo électrique vaille 1000, 2000 ou 5000 ou 10000 euros. C’est pas tellement le sujet. Le sujet, c’est que les gens en est un bon. Donc ça peut paraître idiot comme ça. Mais en fait, c’est bien ça l’important. C’est le fait qu’ils aient envie de s’en servir et qu’il en est là.

00:39:39
JMC: Donc, on va prendre le problème sous l’angle physique. On va regarder comment est ce qu’on doit physiquement organiser le système et à quelle vitesse on peut. On peut déplacer le système. De quelles compétences on a besoin pour ça?

00:39:50
JMC: Et prendre un autre exemple dans la rénovation du bâtiment. Si on veut faire un million de rénovations par an, il faut faire rentrer 2 à 300.000 personnes dans l’artisanat du bâtiment. On les a aujourd’hui, on les a pas et on les forme.

00:40:01
JMC: Pas du reste, parce qu’on continue à dire à nos chères têtes blondes à l’école que si ils sont bons, ils iront à la fac et que si ils sont nuls, ils font maçon.

00:40:06
JMC: Donc, il y a plein de trucs à changer. Il n’y a pas juste le fait de trouver le bon prix du carbone. Et donc, pour rebondir sur le rapport Tirole tout à l’heure,

00:40:14
JMC: je fais partie des gens qui pensent que ce truc est totalement désincarné parce que c’est fait par des gens en chambre qui se sont jamais posé la question de savoir comment former un maçon alors que le vrai problème, il est là. Il est donc dans ce genre de problèmes pratiques.

00:40:28
JMC: Donc, la façon dont on fonctionne, c’est donc un secteur. Dans chaque secteur, on va chercher des gens du secteur avec lesquels on travaille. Il se trouve qu’à côté du chiffre Project, on a créé une association qui s’appelle Les Shifter ou dans laquelle il y a maintenant 10.000 personnes. Il y a des gens compétents techniquement sur à peu près n’importe quoi, donc il suffit de leur demander de faire un appel au peuple en disant qui a envie de nous aider pour avancer sur tel sujet. Et on va chercher des gens du secteur qui connaissent très bien les éléments techniques sous jacents pour nous aider à faire quelque chose qu’on peut mettre sur la table sans rougir. Donc, ça ne veut pas dire que ça sera nécessairement complet, mais ça veut dire qu’on peut le mettre sur la table sans rougir et qu’on pense qu’on est capable d’en discuter.

00:41:05
JMC: Et on va le présenter à un public aussi large que possible. Donc, par exemple, des syndicats, dont par exemple des gens à droite et à gauche, j’ai envie de dire pris dans la rue, à qui on demandera ce qu’ils en pensent. On est en train d’organiser aussi un grand système de mise en débat pour essayer d’avoir un nombre important d’avis externes. Que les gens nous disent ça, votre truc, c’est complètement con. Au contraire. Oui, je comprends bien la philosophie.

00:41:25
JMC: Enfin, je vais finir par un élément issu d’un sondage très récent que j’ai vu, qui m’a beaucoup frappé.

00:41:31
JMC: On a demandé à la population française si ils avait à choisir entre les deux affirmations suivantes laquelle ils préféraient. La première, c’est qu’il faut préserver l’environnement, même si ça doit nuire à la croissance et détruire des emplois. Ou bien il faut préserver à toute force la croissance, même si ça permet pas de s’occuper correctement de l’environnement. Une majorité de la population, y compris dans les milieux modestes, préfère la première affirmation, alors je trouve ça très intéressant et très encourageant. Ça veut dire que je pense qu’aujourd’hui, une large partie de la population est mûre pour penser le système sous l’angle physique. En disant les euro, c’est en termes de bouclage. On verra derrière comment on les organise.

00:42:08
JMC: Et très étonnamment, plus les gens sont vieux, plus ils sont favorables à la croissance, ce qui est quand même un truc très étonnant puisque c’est eux qui vont profiter de moins longtemps.

00:42:16
FB: Alors là, c’est très riche. Tout ce que vous venez de partager? Jean-Marc, est ce que je comprends? C’est qu’évidemment, vous ne croyez pas au concept de la croissance verte. Je crois d’ailleurs que vous mettez aussi en cause le développement durable. Vous pensez que c’est un non-sens et

00:42:29
JMC: un non-sens et un oxymore?

00:42:30
FB: Oui, très bien. Très bien. Et effectivement, vous faites en sorte de mettre en place une force d’intelligence collective pour travailler sur ce plan. Et SQI, ce que je me dis, c’est vraiment en terme d’espérance. Sur quoi on base l’espoir. Vraiment, sur quoi on va bâtir cet espoir pour véritablement se projeter vers un destin commun qui reste quand même un destin qui soit attirant pour nous tous? Et c’est là où je vois qu’il y a sans doute ce point de désaccord. Peut être revenir peut être sur tout ce qui a trait aux énergies renouvelables. Puisque vous, vous y croyez, vous y croyez, moins? C’est ce que j’ai cru comprendre et évidemment un peu les pieds dans le plat. Et puis après, vous vous mettrez vos nuances. Mais je pense que c’est quand même là que ça se joue ?

00:43:15
TOL: Encore une fois, on a beaucoup de points communs entre la démarche de Jean-Marc et positions que défend Jean-Marc et ce que nous, EDF, GDF, on pense. Et puis on fait quotidiennement. Il y a une vraie prise de conscience de l’urgence climatique et ça, je pense que c’est quelque chose qui est peut être vrai aujourd’hui, qui est peut être compris aujourd’hui, mais qu’il était de moins qu’il est peut être qu’il était peut être moins il y a quelques années et surtout qu’il y a encore à gagner, même si, effectivement, les sondages commencent à le montrer. Il y a une vraie conviction dans le groupe EDF qu’on a si urgent. On ne peut plus en parler. Il faut commencer à faire ça. C’est la première chose, la deuxième chose.

00:43:52
TOL: Je pense que dans le Shift Projet, ce que je trouve vraiment super, c’est la partie. On fait travailler beaucoup de gens en intelligence collective parce que je pense que c’est une des clés de la résolution du problème climatique. Ça va être là la partie adhésion collective compréhension par un grand nombre des gens qui vont se sentir impliqués, qui ont sans accès leurs problèmes, leurs solutions. C’est super important.

00:44:13
TOL: De même, et on l’a dit tous les deux, je pense que la partie, même si on arrivait à résoudre le carbone, ce qu’on espère. l’Impact sur l’environnement est vraiment très troublant et même si on arrive à produire tous les mégawattheure dont on a besoin décarbonée, il faut aussi faire attention aux rivières. Il faut aussi faire attention à la biodiversité. Notre problème environnemental va au delà du carbone.

00:44:32
TOL: Je pensais les points qu’on partage.

00:44:34
TOL: Pour autant, quand on arrive sur, on ne va pas rentrer dans des discussions de chiffres machin truc BIVB. Sinon, on va pas s’en sortir. Mais quand on regarde tous les rapports qu’on lit, quand on regarde toute la recherche que font nos gars. J’ai juste parlé de l’efficacité énergétique. Nous, groupe EDF, on dit on s’est engagé à réduire nos émissions de CO2 de 29% d’ici à 2030 en scope 3 des émissions de CO2. C’est pas des mégawattheures d’énergie, c’est le CO2. Donc ça veut dire que quand nous, on fait nos calculs, on se dit à des taux de décroissance 30% et ne sont pas des ordres de grandeur que les calculs pile. Mais se dire en moyenne sur 10 ans, réduire les consommations énergétiques chez nos clients à peu près 3% par an. Nos ingénieurs de chez « Dalkea » qui sont là bas, on dit c’est faisable.

00:45:14
TOL: Donc, si tu veux 4%, c’est peut être un peu beaucoup, mais toi, ça ne me choque pas. Nous, on est pas, on est encore une fois. Quand on regarde tous les chiffres, tous les chiffres qui sont mis dans ces rapports, les terres dont ils parlent, les possibilités de recyclage, les volumes, les espaces, etc. On trouve que les chiffres sont pas, ne sont pas choquants, j’allais dire pas de déconnant, mais on peut avoir une différence d’opinion là dessus.

00:45:35
TOL: L’autre différence d’opinion qu’on a, c’est sur l’utilité du prix du carbone. Le prix du carbone, c’est quelque chose qui nous permet de modifier le comportement des gens aujourd’hui, de modifier les investissements des gens. Facilement qu’ils font aujourd’hui pour demain. Et en plus d’avoir de l’argent à distribuer pour accompagner les gens qui en ont besoin.

00:45:57
TOL: Prendre un exemple. Tu veux faire un des plus gros émetteurs de carbone, c’est le charbon fabrique d’électricité avec du charbon, fermer centrales au charbon. Il y a deux possibilités. La première, tu dis on ferme plus de charbon. Deuxième possibilité, tu dis on va mettre un prix du carbone à 100 euros la tonne 100 euros la tonne, ça fait 100 euros du mégawattheure pour le charbon. On ne peut plus produire de charbon 100 euros la tonne. Tu multiplie par le nombre de tonnes qui sont échangées dans les marchés. Ça fait entre 40 et 50 60 milliards d’euros par an en Europe à utiliser pour donner aux minières de charbon qu’on a mis au chômage pour donner aux producteurs de charbon qu’on a mis au chômage, pour les reformer, etc.

00:46:36
TOL: Nous, le groupe EDF et à la fois les scientifiques, puis l’ensemble du collectif. Un prix du CO2 ce n’est pas la solution parfaite. C’est pas suffisant. Mais si on commence par faire ça, on va actionner des décisions aujourd’hui et ça va nous donner des financements qui nous permettront d’accompagner la transition. C’est pour ça que dans le rapport Blanchard Tirole, il y a beaucoup de choses qui, effectivement, sont un peu abstraites. Mais cette recommandation là nous semble très concrète, très pratique et très juste.

00:47:05
FB: Qu’est ce que vous pensez de ce genre d’outil économique?

00:47:08
JMC: Alors, je vais faire une réponse globale. D’abord, je ne suis ni pour ni contre les renouvelables, ni pour, ni contre le prix du carbone. Je suis tout à fait. Je maintiens mon jugement sur le fait que Tirole et Blanchard sont des universitaires. Il fallait donc trouver des gens qui se croient au point. Une pratique, c’est ça que je voulais dire. Mais tant dans leur commission, ils sont entourés de personnes se frottant aux problèmes pratiques. Donc ils ont fait un truc qui est désincarné à ce titre.

00:47:31
JMC: Sinon, je suis moi. Je pense que quand on est dans une course contre la montre, il faut être pragmatique.

00:47:35
JMC: Donc que les Polonais rajoutent des éoliennes pour remplacer leurs centrales à charbon, je suis tout à fait pour, en attendant un jour, de remplacer la totalité charbon fonctionnant moins plus éoliennes par du carbone, pilotables parce que sinon ils s’en sortiront jamais. Et du carbone pilotables. C’est bien simple, il n’y a que deux modes l’hydro électricité et le nucléaire et sauf à faire du stockage à grande échelle. Mais je ne suis pas sûr qu’on y arrivera dans les délais. Donc, ça peut être un débat aussi.

00:48:00
JMC: Je n’en connais que deux hydroélectricité, nucléaire.

00:48:03
JMC: Donc, tant qu’on est en Norvège, on peut faire de l’Hydro. Donc, on peut faire 100 % de renouvelable. Je n’ai absolument rien contre 100% en Norvège. C’est très bien qu’il l’ait fait. Je suis ravi qu’il l’ait fait.

00:48:12
JMC: On peut faire pas loin de ça en Autriche ou en Suisse.

00:48:15
JMC: Par contre, dans le plat pays qui est celui de Brel, en Pologne, qui est quand même pas très très montagneuse avec la population qu’ils ont aujourd’hui, et si ils veulent garder quelques bagnoles et quelques immeubles, ils n’y arriveront jamais, juste avec des éoliennes et du stockage. En tout cas, pas dans les délais.

00:48:30
JMC: Donc, il faut être pragmatique. C’est juste ça que je suis en train de dire.

00:48:33
JMC: Qu’en France, on remplace du nucléaire par de l’éolien et du solaire me parait être une diversion de moyens délétères. Donc, ça augmente les risques qu’encourent parce que cet argent on l’utilise pas à replanter des forêts avant qu’elles crame comme au Canada, parce qu’elles vont aussi devoir passer à 50 degrés en France.

00:48:51
JMC: On les occupe pas à construire des pistes cyclables pour que les gens puissent rouler en vélo électrique ou pas, au lieu de rouler en voiture, électrique ou pas.

00:48:57
JMC: Du reste, parce que un vélo électrique, c’est quand même 50 fois moins de métal et 50 fois moins de capacité de batterie qu’une bagnole.

00:49:03
JMC: Donc, partout dans le périurbain où on peut faire des trucs en vélo électrique, c’est le déploiement du vélo électrique qui permet de se passer de la voiture le plus vite possible.

00:49:10
JMC: Encore une fois, je suis pragmatique. Moi, je veux qu’on aille vite.

00:49:13
JMC: J’ai dit j’ai écrit un milliard de fois que j’étais très favorable à la pompe à chaleur et je pense par contre que dans le bâtiment, on va voir sur isoler dans la rénovation thermique est une ânerie aussi parce que c’est une dilapidation de moyens qu’il faut décarboner le vecteur. Il faut diviser par deux en gros la consommation et décarboné, le vecteur.

00:49:29
JMC: Je suis d’accord avec le fait que dans certains secteurs, on peut aller plus vite que 3% par an, mais parce qu’on ne peut parler dans tous les secteurs aussi vite. C’est pour cela que pour l’économie dans son ensemble. donc je dis, un an et demi, d’accord, presque autant décarboné rapidement le chauffage, on va y arriver, amis décarboné rapidement la production d’acier, ça va être une autre paire de manches.

00:49:43
JMC: Dans les domaines dans lesquels on est déjà très optimisé. Par exemple, les camions dans les camions, on fera pas 3% par an parce qu’un moteur de camion, c’est déjà hyper optimisé. Parce que le carburant, c’est 25% des coûts du transporteur.

00:49:55
JMC: Donc ça dépend vraiment des secteurs. Il y a des secteurs, encore une fois, dans lesquels on peut faire 3 4% par an. Pas de problème avec ça.

00:49:59
JMC: Mais j’insiste. Je pense qu’aujourd’hui, ce qui nous manque, c’est d’être pragmatique et on sera pragmatique. Le jour où on aura la bonne hierarchie des risques en tête, on ne comprend pas qu’on fait avec les risques liés aux limites planétaires global.

00:50:14
JMC: On est en train de se diriger vers la barbarie et donc on est en train de chipoter, pinailler sur des machins, des trucs et des bidules qui sont des luxes de nantis.

00:50:21
JMC: Le problème n’est pas là. On est dans une course contre la montre pour préserver l’absence de guerre, une espérance de vie à peu près correcte et le fait que les gens mangent à leur faim.

00:50:28
JMC: C’est de ça dont on est en train de parler. On est pas en train de parler, de …

00:50:32
JMC: Alors ce qui nous manque. Là, je suis tout à fait d’accord avec Thomas Olivier, c’est la pédagogie du problème, la capacité à le faire comprendre.

00:50:38
JMC: On peut malheureusement pas compter sur la classe politique qui, en démocratie, est essentiellement démagogique pour faire la pédagogie du problème.

00:50:44
JMC: Et on peut difficilement compter sur les acteurs qui n’ont pas intérêt à ce qu’on change les règles du jeu pour le faire.

00:50:48
JMC: Donc, il ne reste pas énormément de gens. Et enfin, pour finir, cet inventaire désagréable que l’on ne peut pas non plus compter sur les journalistes parce qu’ils ne sont pas là pour faire l’éducation des masses. Ils sont là pour vous parler de match de foot. Ils ne sont pas là pour ça, mais ils le font pas. Quand ils le font, ils ne le font pas. Regardons la manière dont on parle.

00:51:06
TOL: Frédéric le fait…

00:51:08
JMC: je sais, je sais, je suis.

00:51:10
FB: J’ai une ONG d’information

00:51:11
JMC: et je suis délibérément désagréable.

00:51:13
JMC: Mais je pendant longtemps, j’ai monté avec un copain journaliste une école d’hiver à Combloux pour essayer de former des rédacteurs en chef à ces questions là. Pas vu une différence majeure dans le traitement de l’information, y compris avec les gens qui sont passés chez nous. Donc on va dire qu’il y en a 5% qui ont un peu bougé, donc le système est très inertiels. Et puis, ils dépendent de leurs recettes publicitaires quand ils n’en dépendent pas et dépendent de leur audience et du coup, de l’égo des journalistes qui ont besoin de l’audience. Donc, le système est très rigide et en fait, le vrai danger, je le vois là.

00:51:45
JMC: C’est à dire que là où je rejoins tout à fait Thomas Olivier, c’est que le vrai danger, c’est la grande difficulté qu’on a à faire passer une pédagogie du problème à sa juste place dans la hiérarchie des risques qu’on cours, les capacités vraies et les fausses capacités d’action qu’on a et le fait d’avoir une attitude essentiellement pragmatique

00:52:03
JMC: Pour finir sur la taxe. Je pense que la taxe, elle, marche bien dans les pays d’essence très libéraux. Typiquement, la Grande-Bretagne, elle marche moins bien dans les pays d’essence plus planificateurs. Typiquement la France. Elle marche beaucoup mieux dans le secteur be to be professionnelle que dans le secteur du consommateur final.

00:52:22
JMC: Donc, la taxe carbone appliquée à la production électrique en Grande-Bretagne a fait des merveilles. Et si on voulait bien transformer le système européen de quotas en vraie taxe, c’est à dire avec un prix de réserve aux enchères qui croissent tous les ans et une prune qui croissent tous les ans si on respecte pas ces quotas, donc en fait, on en fait une vraie taxe.

00:52:38
JMC: Ça produirait des miracles parce que dans ces domaines là, on peut embaucher des armées de consultants venant de chez Carbone 4 pour faire des tas de calculs au centime près et en disant à 100 virgule, 20, 100 euros et 20 centimes la tonne de CO2. Là, j’ai intérêt à faire un tel investissement dans mon four, sinon, je n’ai pas intérêt à faire à 99 euros et 80 centimes.

00:52:57
JMC: Donc, si on a de la visibilité sur le prix et une armée de consultants dans le secteur professionnel, c’est un très bon système. Pour le consommateur final, je suis maintenant convaincu qu’il faut passer par la réglementation. Ça va beaucoup plus vite.

00:53:10
JMC: Donc, je préfère de très loin un système disant interdiction d’avoir une chaudière à fuel dans les deux ans, interdiction de garder une chaudière à fuel dans les 4 ans. Sauf que la collectivité, si vous n’avez pas les moyens de la changer, vous paye le changement.

00:53:20
JMC: Voilà donc plutôt que de faire taxer de dividendes, on fait réglementations et aides. Je préfère de très loin qu’un système de cette nature, c’est simple et de bon goût. C’est lisible. On comprend où on va. On sait qui on doit former pour faire la transformation, alors qu’avec la taxe, on ne sait pas ce que les gens vont choisir comme solution. Donc, on peut préparer ni la production, ni la formation et les compétences, donc, pour le consommateur final, de très, très loin. Maintenant, je préfère la taxe. Elle est là pour éviter l’effet rebond, mais ce n’est pas le déterminant principal de la politique.

00:53:53
TOL: Tu vois que tu aimes l’économie? C’est très bien. Je pense que pour le coup, quand on lit vraiment dans les détails le rapport Blanchard Tirole, c’est exactement ce qu’ils disent. Eux, ils disent, ils disent la taxe et plus.

00:54:11
JMC: Il détaille pas tellement plus. Il ne sont pas très pragmatique sur le plus. C’est ça que je veux dire.

00:54:19
TOL: Oui, parce que si tu veux, c’est pas leur boulot. Le boulot en économie c’est de dire, nous voulons une économie, c’est à dire la solution la plus efficiente, c’est à dire qui nous permet de l’arbitrage dont tu viens de parler c’est efficient, c’est à dire? C’est ça qui nous amène à faire les bons choix au bon moment, donc à réduire le coût de la transition pour la société. Et donc, l’argument des économies, c’est de dire on va mettre la taxe, ça va envoyer les bonnes incitations.

00:54:38
TOL: Et je pense pas que ça soit un problème de libéralisme ou de ou de ou de dirigiste. C’est juste un problème de bon sens, d’efficacité. Et après, t’as raison. Pour les secteurs sur lesquels on pense que la taxe va être trop lente à agir ou ne va pas le faire tout de suite. T’as raison, ça va créer de l’incertitude dans ce qui va se passer. On peut très bien mettre des normes et là, pour le coup.

00:54:56
TOL: Et encore une fois, je pense que les gens sont à leur place. Blanchard Tirole, c’est pas des chauffagistes, donc ils savent pas sur quel point mettre l’accent. Mais en revanche, ils disent c’est sûr qu’avec la taxe, on ne va pas tout faire.

00:55:07
TOL: Qu’il y a deux points qui sont importants.

00:55:08
TOL: Et je voudrais revenir au premier point, c’est la redistribution. Quand tu dis on va donner de l’argent aux gens, quand on leur contrôle leur économie, quand on leur fait changer de chaudière. Il y a le quantitativeasing. Il y a des tombereaux d’argent public et d’argent de la banque qui se déversent. On sent bien que les dettes sont importantes donc l’intérêt de la taxe. Il ne faut pas sous estimer le pouvoir redistributif, mettre une taxe, d’utiliser cet argent pour financer la transition.

00:55:35
TOL: Le deuxième aspect? Qui me semble important. Avec une taxe carbone, c’est qu’elle elle nous permet d’impacter nos voisins, c’est à dire qu’à partir du moment où on dit on va faire une taxe carbone aux frontières. Les Chinois qui ont dit Si je veux continuer à exporter en Europe, je suis obligé de payer, de créer une taxe chez moi et donc pour le coup, tu peux non seulement impacter ton environnement, mais tu peux impacter le reste.

00:56:03
TOL: Et le troisième point qui me semble important, qui rejoint beaucoup des discussions qu’on a, qu’on voit dans le rapport Blanchard Tirole. Il parle beaucoup de gouvernance et dise Pour que tout ça marche, il faut créer des institutions indépendantes, transparentes, dans lesquelles les citoyens auront confiance parce qu’ils se diront s’il y a une taxe carbone, ce n’est pas fait pour enrichir les banquiers, etc. Mais ça sera administré par une agence indépendante, transparente, et je pense que ça rejoint beaucoup des sujets qu’on a sur la transparence de la gouvernance et qui nous, en tant que barman, en tant que scientifique.

00:56:31
TOL: Et puis les cadres d’EDF , les employés d’EDF. Ce qui nous affole, c’est qu’il n’y a pas de transparence dans la gouvernance ou le problème du changement climatique et que ce n’est pas assez bien expliqué. Il n’y a pas d’institutions qui soient vraiment transparentes dans la sur laquelle on puisse s’appuyer et c’est là dessus que je voudrais.

00:56:48
FB: Je pense qu’effectivement, on a vraiment besoin de cette acceptabilité sociale et pour cela, il faut la pédagogie. Il faut les bons instruments, il faut les bonnes politiques publiques. Je vous propose qu’on passe aux questions du public justement parce que les questions tombent et elles sont passionnantes. Et ça va vous permettre sans doute encore une fois, de creuser. Et donc, je vais prendre une première.

00:57:11
FB: Quelle analyse faites vous sur les conclusions du récent rapport de l’AIE concernant les tensions à venir sur les matières premières? Qui veut prendre les gens à l’honneur?

00:57:24
JMC: En fait, il y a quelque chose que beaucoup de gens n’arrivent pas à comprendre facilement. C’est que quand on a une matière première qui est essentielle au fonctionnement de l’économie du pétrole, par exemple sans pétrole, pas de transport et sans transport, on n’a pas d’économie. Je veux parler de l’acier aussi. Aujourd’hui, il y a de l’acier absolument partout, sans acier. On fait à peu près rien si cette matière devient plus rare. Le prix de cette matière ne peut pas augmenter indéfiniment parce qu’en fait, si cette matière devient plus rare, l’économie elle même se porte moins bien. Donc, en fait, on a un sujet sur le P.I.B. Une matière essentielle à l’économie fait défaut à cause de ce que j’avais essayé d’expliquer tout à l’heure.

00:58:08
JMC: C’est une ressource essentielle et donc on peut assez facilement théoriser que quand une matière essentielle commence à se raréfier, son prix n’est ni durablement élevé, ni durablement bas, mais durablement volatil. Et donc, c’est juste ça que la AIE est en train de rappeler pour moi.

00:58:22
JMC: Donc, après un pétrole bas, un pétrole haut, puis après un pétrole haut, il y aura à nouveau un pétrole bas, etc. Voilà, c’est aussi bête que ça.

00:58:33
JMC: Alors pourquoi est ce que les matières premières peuvent faire un peu plus défaut? Parce qu’il y a. En fait, il y a une oscillation. D’abord, il y a pour certaines matières toutes, mais il y a des possibilités d’en extraire qui se raréfient.

00:58:46
JMC: je vais donner un exemple quand on a commencé à extraire du cuivre de la mine de Rio Tinto en Espagne. Je crois que la teneur en métal du minerai était aux alentours de 20%. Aujourd’hui, la teneur en métal des mines exploitées en moyenne dans le monde s’est 04%. Bon, donc, ça, ça veut dire qu’il faut plus d’énergie pour extraire du cuivre, du minerai. Donc ça veut dire que par construction, c’est plus cher ou en tout cas, ça demande plus de ressources. Si ces ressources valent plus cher, c’est plus cher.

00:59:11
FB: C’est le même système quand on va exploiter le gaz de schiste.

00:59:14
JMC: En fait, je vais aller un peu plus loin, plus généralement dans le raisonnement. En fait, ce qui va marquer économiquement la raréfaction d’une ressource, c’est pas que son prix monte ou que son prix baisse, c’est que la quantité d’investissements qu’il faut mettre sur la table pour en extraire une unité additionnelle augmente. Et c’est Meadows qui avait dit, ça.

00:59:36
JMC: Donc en fait, c’est bien vu. C’est ça le vrai marqueur de la raréfaction progressive d’une ressource. C’est pas que son prix montent ou descendent, c’est ce qui va se passer. Quand tu mets un coup dans un sens ou dans l’autre, c’est qu’en le capex, enfin, le capital qu’il faut mettre sur la table en terme de ressources physiques et donc de coûts le plus souvent qu’il faut mettre sur la table pour extraire un baril additionnel, une tonne de cuivre, etc. Augmente sans cesse et dans un certain nombre de domaines, on est déjà en train de constater cette évolution et donc ça veut juste dire que ça préfigure un moment où des ressources essentielles pour l’économie vont devenir moins faciles à extraire et donc leurs prix vas osciller. Après les prix bas les prix remontent.

01:00:15
FB: Vous voulez ajouter quelque chose Thomas Olivier ?.

01:00:18
TOL: C’est toujours un peu la même chose. C’est de dire oui, c’est vrai, mais pour le coup, c’est l’ingénieur qui répondra.

01:00:22
TOL: À partir du moment où on voit qu’il y a des ressources qui viennent structurellement plus rares. En général, on essaye de les recycler. Moi, j’ai travaillé un moment dans l’aluminium. C’était assez marrant parce que les canettes d’aluminium, le pourcentage de canettes recyclées est proportionnel au prix de l’aluminium sur les marchés mécaniques. C’est mécanique. C’est à dire que quand le prix de l’aluminium augmentent, tu vois des recycleurs, des ferrailleurs qui ramassent les canettes et qu’il écrit qui les fondent. Quand le prix de l’aluminium est trop bas, tu vois plus de recyclage.

01:00:49
TOL: Donc je suis tout à fait d’accord avec l’analyse des gens. Le seul bémol que je mettrais, c’est de dire il y a quand même le système s’adapte et ce n’est pas un truc d’économie. C’est vraiment un truc d’ingénieur, c’est à dire que les prix. On voit bien qu’il n’y a que le pétrole ou que le nickel. Le cobalt devient durablement plus rare et qu’on a de plus en plus de mal à sortir les ingénieurs vont trouver une solution pour utiliser un peu moins nickel cobalt pour recycler le nickel cobalt qu’on a. Ça va prendre de l’énergie à recycler.

01:01:11
JMC: Rcycler le pétrole, c’est plus dur :)

01:01:12
TOL: Recycler, c’est plus dur, c’est pour ça qu’on va faire du … Mais t’as raison, mais c’est pour ça qu’on va faire de l’énergie, du nucléaire, des renouvelables.

01:01:21
TOL: Mais moi, je pense qu’il y a une capacité d’adaptation qui est importante dans l’appareil industriel et on le voit dans toutes les industries dans lesquelles on travaille. Les gens sont malins quand les prix d’une ressource augmentent, quand le cout d’extraction augmente, les gens substituent, recyclent. Enfin, on ne regarde pas juste le prix monter.

01:01:39
JMC: Si je peux me permettre à une limite quand même à la substitution parce que les facteurs de substitution ne sont pas toujours aussi servent d’abord les propriétés chimiques, des éléments ne sont pas substituables. Et puis après, on peut créer une tension sur une autre source qui est très, très forte.

01:01:53
JMC: Je vai donner deux exemples. Il faut 50 à 100 fois plus de métal pour faire un kilowattheure solaire que pour faire un kilowattheure nucléaire ou charbon gaz du reste, appareil électrique 50 à 100 fois plus. C’est pas 10% en plus.

01:02:05
JMC: Il faut 1000 fois plus de foncier, 1000 fois plus pour faire de l’électricité avec du solaire qu’avec du nucléaire, 1000 fois plus.

01:02:13
JMC: donc le basculement, c’est la raison pour laquelle on est allé vers les combustibles fossiles dans l’énergie, c’est parce que c’est extraordinairement concentré, dense, hyper facile à stocker et à transporter.

01:02:23
JMC: Comparé aux énergies renouvelables qui sont diffuses pour l’essentiel très compliquées à transporter, même pour les plus concentrées d’entre elles, notamment le bois, c’est compliqué quand même, à l’époque de la marine à voile.

01:02:33
JMC: Et je le redis, les systèmen ne sont pas bouclées, c’est à dire qu’aujourd’hui, un panneau solaire, un panneau PV se fait avec du charbon, du pétrole et du gaz. Combien vaudra le quelle sera la facilité d’accès à un panneau solaire le jour où la mine devra être faite avec du solaire? La métallurgie de base, voilà une fonderie d’aluminium avec des panneaux solaires, un laminoir d’aluminium avec des panneaux solaires, des bateaux pour transporter l’aluminium sur terre avec des panneaux solaires et des tractopelles pour installer les panneaux avec de l’énergie solaire, etc.

01:03:00
JMC: On en reparlera du prix.

01:03:01
JMC: A mon avis, c’est évident qu’aujourd’hui, on a un artefact économique qui est que le prix de production des dispositifs dits renouvelables hérite de la productivité issue des combustibles fossiles.

01:03:13
JMC: C’est pour ça que je ne crois pas du tout aux projections de prix de l’AIE. Le jour où je supprime les combustibles fossiles, le prix sur les panneaux solaires et les éoliennes fait fois 50, c’est absolument évident pour moi.

01:03:22
FB: Ce que je trouve intéressant, c’est qu’on voit bien que, de toute façon, on va devoir transformer la société dans laquelle on vit. L’idée n’est pas de voir de quelle manière on va garder le modèle dans lequel on vit sobrement et donc dans quelle échelle de temps on va faire face à ce défi. Alors, tout de suite, il y a des implications politiques politico sociale évidentes et du coup, je vous propose de passer à cette autre question qui émane du public

01:03:43
FB: Comment pensez vous qu’une société démocratique puisse volontairement organiser la réduction structurelle du PIB nécessaire pour limiter les émissions de CO2,

01:03:56
JMC: J’ai une bonne nouvelle. La récession structurelle, en fait, elle a déjà commencé en Europe. Quand on regarde, le PIB est vrai, les mètres carrés qu’on construit. La production industrielle qu’on produit pour nous mêmes, etc. En fait, c’est déjà à la baisse depuis 2007.

01:04:09
FB: JE vous ai entendu plusieurs fois parler de cette fameuse année de 2007. Qu’est ce que vous entendez par là?

01:04:16
FB: Alors, qu’est ce qui s’est passé en 2007? En fait, il s’est passé en 2006, la date de 2008 et la date de 2006.

01:04:22
FB: Il s’est passé le pic de production du pétrole conventionnel, c’est à dire il s’est passé en Europe. Il s’est passé d’autres trucs en plus.

01:04:29
FB: Il s’est passé que le pétrole qu’on extrait des gisements ordinaires, entre guillemets. Tout ce qui n’est pas le pétrole de schiste et les sables bitumineux du Canada est passé par un maximum historique absolu. Et depuis, ça décline.

01:04:40
FB: Bon, quand on regarde les zones dans le monde qui produisent ce pétrole sur toutes les zones sauf les États-Unis, l’Afrique est en déclin depuis 2009. La mer du Nord est en déclin depuis 2000. La Chine est en déclin depuis 2011. La Russie, ça y est, ils l’ont annoncé, aura passé son pic en 2019, donc ils pensaient le passer en 2021. Mais à cause du vide.

01:04:58
FB: Voilà donc. En fait, l’essentiel des pays dans le monde ont passé leur pic de production sur ces gisements là.

01:05:07
FB: Le Shelloil, il a donc le pétrole de schiste aux États-Unis, qui est un pétrole, le fonds de tiroir. C’est un mauvais pétrole. Il faut en gros consacrer à l’extraction de ce pétrole un quart de l’énergie qu’on obtient alors que le pétrole conventionnel, on est à quelques pourcents. Donc, ce n’est pas du tout pétrole.

01:05:23
FB: Sans compter la dégradation environnementale.

01:05:25
JMC: Celle là est pas terrible parce qu’en fait, on trouve une fracture à 3000 mètres sous terre.

01:05:28
FB: Et l’eau?

01:05:31
JMC: Il ne faut pas plus d’eau pour exploiter ce pétrole là que pour exploiter du charbon, par exemple. Les mines de charbon utilise des quantités d’eau faramineuses pour laver le charbon.

01:05:39
JMC: La Presse s’est focalisée sur des problèmes qui n’en sont pas.

01:05:41
JMC: Le vrai problème, c’est que c’est une énergie fossile.

01:05:44
JMC: Le deuxième vrai problème, c’est qu’il y a une occupation en surface absolument faramineuse parce qu’il fallait faire un puits tous les 500 mètres de la taille d’un terrain de foot.

01:05:50
JMC: Donc, quand vous regardez les photos aériennes des champs de pétrole de schiste aux Etats-Unis, c’est hallucinant. Je veux dire les constellations de puits, etc. Bon, il n’y a pas grand monde au Texas dans les endroits où ils poussent 3 arbustes. Donc on s’en fout un peu. Mais enfin, si on avait voulu faire ça dans les Cévennes, c’était pas là. Ce n’était pas la même histoire. Là bas, c’est tout plat. Donc faire des pistes, on ne peut pas faire d’oléoducs parce que la production est trop faible. Donc, tous évacuent par camions. Donc, il faut faire des pistes qui relient tous les puits et tous les 500 mètres. Donc, en gros, c’est presque comme faire une ville en termes artificialisation, on n’aurait pas fait ça en Europe, donc c’est très particulier aux Etats-Unis. Et puis, en plus, le droit minier s’en mêle.

01:06:27
JMC: Il n’empêche qu’ils ont jamais gagné un radis avec ce pétrole de schiste, c’est à dire qu’en termes de cash flow, ils ont toujours été négatifs depuis le début de cette industrie, il n’y a qu’eux. Quand ils ont arrêté de faire des puits partout et que la production a décliné sur la production déclinante restante, ils se sont mis à gagner de l’argent.

01:06:42
JMC: C’est quand même très drôle. Donc, en fait, on ne peut gagner de l’argent sur ce truc là que quand la production baisse. Emmerdements.

01:06:47
JMC: Donc, tout ça, mis bout à bout, fait que la production de pétrole mondial conventionnel a décliné à partir de 2008. Le Shelloil était un phénomène essentiellement américain, donc la quantité de pétrole disponible pour les Européens s’est mise à baisser à partir de 2007.

01:07:01
JMC: La mer du Nord a passé son pic de production en gaz en 2005. Or, 60% du gaz européen venait de la mer du Nord. A cette époque là,

01:07:08
JMC: et enfin, le charbon européen est en déclin depuis les années 60 parce que ça fait deux siècles comptable dans notre charbon et le charbon voyagent peu, contrairement à ce qu’on peut penser, il n’y a que 10% du charbon mondial ne servant pas à la métallurgie qui passe une frontière entre le pays de production et la consommation, c’est une énergie domestique essentiellement.

01:07:25
JMC: Donc, l’Europe est aujourd’hui en déclin, sur le charbon en déclin, sur le pétrole, en déclin, sur le gaz. Climat ou pas climat?

01:07:30
FB: Et votre propos est de dire que la croissance n’existe plus ?

01:07:35
JMC: La seule croissance qu’on a depuis, c’est de la fausse croissance. Encore une fois, c’est de l’inflation d’actifs et le quantitativeasing crée de l’inflation comme il se doit lorsque le de la création monétaire. Mais comme l’argent ne quitte pas les investisseurs qui à les banques qui reçoivent cet argent et que font les banques avec elles le distribuent pas aux épargnants, elles ont pas besoin. Il suffit qu’elles se prend des crédits pour ça. Elles investissent. Et donc, cette inflation, au lieu de concerner les montres et les paires de baskets, concerne les trucs qui s’achètent pour des investisseurs, donc des oeuvres d’art, des entreprises, des mètres carrés, des forêts, des terres agricoles. Tout cela voit son prix exploser. Prix des terres agricoles dans le monde a été multiplié par six en douze ans, en quinze ans. Hallucinant.

01:08:17
FB: Et du coup, je reviens à la question du public sur la société démocratique.

01:08:20
JMC: Absolument. Il y a une question incidente pourquoi 2007?

01:08:23
FB: Oui, c’est vrai.

01:08:24
JMC: Mais qui était majeur? Parce qu’en fait, aujourd’hui, on n’a même plus besoin de vendre la décroissance au public français.

01:08:29
JMC: On a juste besoin de lui faire comprendre que c’est déjà là qu’on a plus besoin de l’avant. Si elle est déjà là, elle est déjà en route. On la maquille avec des machins, mais en fait, elle est déjà là.

01:08:40
JMC: On voit bien aussi dans la vie des jeunes. Par exemple, la colocation est de plus en plus fréquente. La colocation, c’est de la sobriété parce qu’une seule salle de bain pour trois, c’est plus sobre que d’avoir chacun sa salle de bain, chacun ses chiottes et chacun sa cuisine.

01:08:51
FB: Vous voyez,

01:08:52
JMC: c’est déjà de la sobriété et

01:08:54
FB: de dans la transformation des usages. Vous voyez un

01:08:57
JMC: On y est, on y est déjà pour partie. Donc ça, c’est la bonne nouvelle. Ça veut dire que les gens se rendent compte que c’est possible puisqu’on est déjà en train de s’organiser comme ça.

01:09:04
JMC: Alors, la décroissance est dramatique. Si vos revenus baissent et que vos charges ne baissent pas, mais si vos charges baissent à mesure que vos revenus baissent. On peut discuter peut être,

01:09:13
JMC: donc en fait, si on quitte l’indicateur monétaire, j’y reviens parce que c’était ça mon point tout à l’heure et qu’on dit physiquement, les gens ont besoin d’un toit, ils ont besoin d’espoir, ils ont besoin d’un job et ils ont besoin d’avoir confiance pour leurs gamins. Peut être qu’on peut parler d’argent une fois qu’on a traité ces problèmes là.

01:09:29
JMC: Et donc, c’est pour cela que je pense que la question de la décroissance dans un pays, dans une démocratie, il ne faut pas la vendre comme tel puisque c’est compliqué.

01:09:38
JMC: Par contre, il y a quelque chose qui ressemble s’appelle sobriété. Les gens commencent à voir.

01:09:42
JMC: Le fait qu’il y a des tas d’éléments pas économiques sur lesquels on peut gagner. Quand on perd sur les éléments économiques, ça commence à faire son chemin.

01:09:49
JMC: Si, par exemple, vous faites du vélo plutôt que l’électrique plutôt que de faire de la voiture. Certes, vous avez plus votre voiture, mais vous êtes un peu plus en forme, vous êtes en meilleure santé, vous allez avoir vos coûts de santé qui vont baisser.

01:10:02
JMC: Ou alors il y a déjà un certain nombre d’éléments que vous êtes de meilleure humeur, vous êtes plus en forme, vous n’êtes pas coincé dans les bouchons, ça vous rend aussi de meilleure humeur. Vous avez un certain nombre d’avantages que vous y gagner et des avantages non économiques, mais les avantages réels.

01:10:17
JMC: Je pense que la seule façon de faire passer ça en démocratie, c’est de paradoxalement quitter le débat.

01:10:26
JMC: C’est le genre de dépasser et d’arrêter d’avoir un débat purement économique. Et le PIB, il monte, il monte, il descend et descend. On s’en fout.

01:10:32
JMC: La seule chose qu’il faut, c’est que le système soit ajusté pour savoir gérer la baisse, comme la hausse. Et aujourd’hui, en fait, il n’est pas capable de s’ajuster quand les recettes baissent. C’est son problème,

01:10:42
FB: Donc il va falloir voir ça.

01:10:43
FB: Thomas Olivier avant fait ce que je veux bien faire pour qu’on avance. C’est juste. Je trouve intéressant parce que vous avez parlé de l’aspect un peu désincarné de ces réflexions, etc. Pour le coup, le groupe EDF vous êtes dans le réel, dans le concret. Puisque vous êtes un groupe industriel, vous devez faire face à des stratégies à long terme. Là dessus, et je vois qu’il y a cette question qui est à mon avis, beaucoup vous intéresser.

01:11:06
FB: Que peuvent faire les collaborateurs depuis l’intérieur? Une approche bottom up pour convaincre leurs Comex, le management de transformer leur business model immédiatement entre parenthèses? Pas à dix ou vingt ans pour, par exemple, abandonner tout de suite les produits vache à lait hautement carbonées. Boum, on est dedans!

01:11:28
TOL: La bonne nouvelle, c’est qu’il n’y n’a pas besoin de convaincre le Comex du groupe EDF. On a pas

01:11:36
FB: si c’est bien ce que c’est bien de le dire,

01:11:38
TOL: mais ce n’est pas des paroles en l’air. La stratégie du groupe EDF, elle, est très claire on va être l’énergéticien décarbonée. On va les Décarboné chez nos clients, on veut. On veut produire à la fois d’électricité décarbonée chez nous. On veut accompagner nos clients dans leur décarbonation. On n’a pas de produits carbonés vache à lait, produit. Là où on en a nos profits, c’est dans la production d’électricité décarbonée.

01:12:03
TOL: Le nucléaire doit être le 80, 85% de nos profits.

01:12:06
JMC: Il y a les Italiens

01:12:08
TOL: Il y a et les Italiens. Mais quand tu regardes en pourcentage, c’est quand même pas énorme. Il y a encore des délégations business dont on ne sait pas, mais par rapport à un truc qui est en pointillé, qui est super important par rapport à d’autres groupes industriels. Nous, tout notre cash, tous nos capex y vont dans le décarbonés.

01:12:24
TOL: On en finance donc l’EPR à Flamanville, on finance le père GPC, on essaye de faire d’autres EPR en Angleterre, on est en Inde pour des contrats. Pour faire 6 l’EPR, on discute avec le gouvernement polonais. On est partout sur les renouvelables. On est en train de finir un champ au large de Saint-Nazaire. On a gagné hier une enchère aux Etats-Unis, au New Jersey, pour 1500 mégawatts. Donc, les milliards de capex qu’on fait, on les fait dans le décarbonés.

01:12:52
FB: C’est de l’éolien, je crois.

01:12:53
TOL: C’est de l’éolien marin 1500 mégawatts au large du New Jersey. Donc non. La stratégie du groupe EDF est claire et les actions du groupe EDF sont claires.

01:13:02
TOL: Après, j’aimerais revenir sur cette histoire de PIB. Il y a plusieurs sujets qui sont vraiment hyper importants.

01:13:10
TOL: Le premier, c’est de la sobriété. C’est quelque chose de très important qui est effectivement plus compréhensif, plus aisé, plus aisé à accepter que la décroissance. Il y a beaucoup d’usages.

01:13:20
TOL: Je pense qu’il y a une différence entre dire. On va faire du vélo électrique dans les villes parce que 80 des voyages de mobilité dans le rapport du chiffre sont des trucs de moins de 5 km. Franchement, 5 km dans Paris avec un vélo électrique, ça fait aussi bien qu’avec une voiture. Pas de souci pour moi, c’est de la sobriété.

01:13:39
TOL: On vit dans des appartements éventuellement plus petits. Les enfants, de toute façon, aiment bien rester avec leurs parents. Les parents aiment bien garder leurs enfants. On va partager un peu plus longtemps. Ça, c’est une chose très claire,

01:13:48
TOL: en revanche, de dire on va plus avoir d’énergie et donc on aura une décroissance brutale de l’économie de 3 à 4, 5, pour cent par an pendant une période longue. Ça, pour moi, ce n’est pas de la sobriété, c’est autre chose.

01:14:04
TOL: Et ça? La plupart des économistes, la plupart des scientifiques, te disent c’est compliqué a avoir une période longue de décroissance de l’économie. Je pense que c’est là où tu voulais aller au début, sont dans un système démocratique, dans une société stable. Et je pense que ce qui nous, ce qui nous anime, c’est de dire on ne veut pas aller là, nous, ce qui nous anime, c’est dire on ne veut pas se retrouver dans cette situation à faire face à 5 ou 10 ou 20 ans de décroissance forcée. C’est pas prendre le volant à Paris. C’est 3% de PIB par an. On ne peut plus payer. Là, c’est déjà très compliqué. On ne veut pas aller là. Donc, il faut décarboner aujourd’hui parce que il est urgent,

01:14:39
FB: éviter le choc et avoir la maîtrise de cette transformation. C’est un peu ça. En fait, si

01:14:44
TOL: C’est ce qu’on essaie de faire,

01:14:46
JMC: je pense qu’il y aura encore une partie à laquelle on n’échappera pas.

01:14:50
FB: Alors, peut être juste. Encore une question un peu technique, mais quels indicateurs économiques pour remplacer le PIB? Si c’est nécessaire d’en avoir un,

01:14:58
JMC: ce n’est pas nécessaire de le remplacer. C’est nécessaire de faire. C’est nécessaire d’avoir des plans pour l’avenir qui ne présuppose pas qu’il augmente. C’est très différent. Je prends un exemple idiot issu de notre propre vie et je vais prendre toujours un exemple idiot. C’est notre puissance musculaire, la puissance musculaire d’un individu. Elle augmente entre 0 et 1, 20 ans, puis après,

01:15:23
FB: ça se passe moins bien.

01:15:26
JMC: C’est stable pendant un certain temps. Et puis ça baisse.

01:15:29
JMC: Est ce qu’au moment où ça se met à baisser, c’est un drame? Pas nécessairement. Ça serait un drame si on disait il faut que cela augmente indéfiniment jusqu’au jour de ma mort. Pour les gens qui meurent en montagne, c’est ce qu’il se passe quand même. Mais par contre, les sinon, tant que ça ne baisse pas dans des proportions dramatiques. Bon, on s’en accommode encore un peu moins vite quand même. Pas très grave si on court un peu moins vivant.

01:15:53
JMC: Donc là, c’est exactement pareil. En ce qui concerne le PIB, je pense que ce qu’il faut, c’est avoir des plans pour l’avenir qui ne présuppose pas qu’ils augmentent en permanence. Alors, là où je suis d’accord, c’est qu’il y a des cas de figure. C’est plus compliqué de dire à des retraités vous allez retourner vivre chez vos gosses parce que ça vous évitera de payer votre logement que de dire aujourd’hui, vous allez au boulot en bagnole. Allez y donc en vélo.

01:16:15
JMC: Donc c’est évident qu’il faut commencer par des trucs qui sont plus simples.

01:16:19
FB: Il faut y aller pas à pas .

01:16:21
JMC: Après, si les retraités, vous leur dites, (il y a besoin d’accompagnement pour tout ça. J’en ai parfaitement conscience), donc je suis pas en train de dire « Y’a qu’à faut qu’on ».

01:16:29
JMC: Vous leur dites, vous avez maintenant que les enfants sont partis. Vous habitez dans un logement qui est trop grand pour vous. Donc, la société va vous faciliter la vie pour vous aider dans un machin plus petit. Et donc, on va éviter de construire des logements nouveaux juste parce que vous restez dans un logement trop grand. C’est aussi une forme de sobriété.

01:16:46
JMC: Bon, est ce que c’est un truc dramatique? Ça dépend. Donc voilà, ce qui est sûr, c’est que tant qu’on n’y a pas réfléchi, on n’a rien trouvé. Donc moi, mon premier combat est de dire faisons au moins l’effort de réfléchir à la façon dont s’organise dans ce genre de contexte.

01:17:02
JMC: À voir ce que les gens sont facilement prêts à accepter moins facilement, prêts à accepter ce qu’ils ont compris de la situation future. Pas compris de la situation future, etc.

01:17:11
JMC: Là où je suis moins serein que Thomas Olivier, c’est que je pense que les 50 degrés au Canada, le million de réfugiés syriens et autres plaisanteries et les moins 40% qu’on a eu en France sur les patates ou le blé, c’est juste un apéritif.

01:17:22
JMC: Donc, il faut bien qu’on comprenne qu’à un moment, dire on l’aura pas parce qu’on ne veut pas, c’est pas ça qui va se passer. On va l’avoir de toute façon, mais d’une façon non gérée.

01:17:31
JMC: Bon, on va commencer. Le Maghreb va s’assécher. Aujourd’hui, les pays du Maghreb nourrissent leur population parce qu’ils ont des sols d’exportateurs sur des trucs qui ne vont pas durer.

01:17:41
JMC: Le tourisme, le tourisme. Quand il y aura plus de pétrole et plus d’avions, c’est fini. l’Algérie, son pétrole et son gaz, pétrole et gaz, ils s’épuisent. Ils sont en train de baisser. Ils sont incapables d’avoir une agriculture autosuffisante dans ces pays là. En plus, le pays est en train de s’assécher.

01:17:56
JMC: Donc, il n’est que d’attendre et on va avoir quelques dizaines de millions de personnes qui voudront aller voir de l’autre côté de la Méditerranée. Le temps qu’il fait, c’est juste une affaire et je ferais la même chose à leur place. Donc, je suis pas du tout en train de les accuser de quoi que ce soit.

01:18:08
JMC: C’est juste un élément de déstabilisation parmi d’autres.

01:18:10
JMC: Voilà donc l’idée qu’on va pouvoir vivre à l’avenir dans un monde stable dans lequel on n’a qu’un seul problème à gérer qui est d’installer des éoliennes. Je n’y crois pas.

01:18:19
JMC: Je crois que malheureusement, on va vivre dans un monde dans lequel l’instabilité. Que dans ce contexte là, même si on la veut pas la décroissance du PIB, on va se la farcir.

01:18:30
JMC: Je dis réfléchissons maintenant où on a encore un peu le temps de le faire. On est pas encore à la rue. On est encore un peu confortable à quelque chose qui n’a pas besoin de cette croissance et qui est capable d’encaisser des chocs parce que malheureusement, on n’a pas fini d’en encaisser.

01:18:46
JMC: C’est ça, mon propos. Je ne suis pas en train de dire que je souhaite à tous. Je ne suis pas un collapsologue. Je suis pas en train de me délecter avec gourmandise du fait que le système risque de s’effondrer.

01:18:56
JMC: Non, je dis justement parce que c’est un risque. Essayons de nous couvrir contre ce risque et plus on anticipe et plus on y réfléchit à l’avance et en général, on se porte.

01:19:06
JMC: Voilà, donc c’est ça, c’est ça mon sujet. Et faisons l’effort d’y réfléchir avec un cahier des charges qui est celui qu’on va vraisemblablement avoir devant nous, que ça nous plaise ou pas, qu’il y ait une diminution de moyens parce que la terre est finie et que c’est comme ça.

01:19:18
TOL: J’aimerais y a deux points,

01:19:20
FB: le temps file vite, donc il va falloir qu’on aille plus vite. Mais on a encore deux questions.

01:19:23
TOL: Deux réponses.

01:19:27
TOL: Une première sur l’urgence. Je pense que l’on est vraiment d’accord là dessus et je veux que ça soit clair pour tout le monde.

01:19:32
TOL: Nous groupe EDF, moi, en tant que scientifique, on est d’accord sur le fait qu’on n’a plus vraiment beaucoup le temps et c’est pour cela qu’on insiste un peu lourdement.

01:19:41
TOL: Mais la répétition est la mère de la pédagogie pour mettre un prix du carbone. Maintenant, maintenant, maintenant qu’il va commencer à faire basculer les gens parce que ça, c’est une conviction. L’intérêt du prix, c’est que ça n’est pas que c’est pas coercitif.

01:19:54
TOL: Dire aux personnes âgées la société va vous trouver un logement. Ça fait un bon j’exagère un peu, mais ça fait un peu Corée du Nord.

01:20:03
TOL: En revanche, le prix augmente parce que parce que ça vous, naturellement, vous allez changer votre comportement. C’est important et je pense que ça, c’est différent. Et ça, je pense que c’est un point important. C’est pour ça qu’on insiste pour le prix du carbone parce que ça transfère aux citoyens la responsabilité de leurs actes et de leurs décisions.

01:20:20
TOL: Enfin, juste un point pour finir, parce que là, tu vas adorer. Le PIB n’est plus la mesure utilisée par les économistes pour mesurer le bien être. Il y a la nouvelle réflexion économique d’ailleurs, qui qui par les mêmes auteurs qui ont commencé à travailler après le rapport Meadows dans les années 70. Ils ont réfléchi à une façon d’incorporer les ressources naturelles épuisables dans les modèles de croissance et donc le rapport Dasgupta, qui a été publié en 2021 en février 2021. C’est toute une théorie.

01:20:50
TOL: C’est toute une conception économique qui dit en fait le PIB, sa mesure juste les flux marchands des biens. La vraie mesure de dévolution d’une région, d’un pays d’une année sur l’autre, ça prend en compte à la fois les biens marchands, mais aussi l’évolution des ressources naturelles. Et donc, si on a pris plus de biens marchands et ça rejoint un peu ce que tu disais tout à l’heure, mais que pour produire ces biens marchands, on a détruit plus de ressources naturelles. L’indicateur global, il a baissé parce que ça a coûté plus en ressources naturelles et ressources naturelles. Dans cette définition, on attrape tout à la trappe les stocks d’eau propre, les stocks d’herbe, la biodiversité.

01:21:23
TOL: Ça nous a coûté plus en termes de biodiversité que ce que cela nous a rapporté dans On a baissé notre bien être. Donc tu vois, l’économie avance bien et progresse ainsi. C’est important, bien sûr.

01:21:35
FB: Comme vous êtes très pédagogue, une réponse très courte, juste. Quelle est la différence entre décroissance et récession?

01:21:41
JMC: À une récession et une décroissance du PIB. Bon, ben oui, c’est sa définition

01:21:49
TOL: La récession. C’est temporaire. Quand on parle de décroissance, c’est quelque chose de plus à long terme. La récession s’est. TAC tac tac, puis plouf d’affilée, ça baisse et après, ça repart. D’accord, mais en général, la récession, quand on le comprend, c’est un truc qui est plutôt temporaire. En revanche, quand tu parles de décroissance, on a l’impression…

01:22:15
JMC: Il y a une différence entre la définition technique et la valeur et le sens qu’on lui donne alors. Moi, je parlais juste de la définition technique. Techniquement, la décroissance, c’est la baisse du PIB et donc la récession. Après que dans les valeurs, les gens qui en parlent disent que par ailleurs, ça doit être un souhait. Et ça, c’est

01:22:31
FB: l’idée d’en organiser la décroissance. Ça, c’est autre chose.

01:22:33
JMC: Moi, je parlais juste de la définition technique.

01:22:35
FB: On est d’accord. Allez juste vraiment, parce que je trouve que c’est trop sympa. Il y a quelqu’un qui a écrit je valide la position de Thomas Olivier Lautié, c’est que la communication, c’est que ce n’est que la communication pour le passage à l’action qui sera un élément clé pour l’avenir. Quel serait votre conseil pour accroître la connaissance au plus vite? Et on en terminera par là parce que ça, c’est une solution. Comment on fait?

01:22:57
TOL: Ce n’est pas ma position. C’est ce que fait Jean-Marc. Je pense que la pédagogie est d’accord tous les deux. C’est ça qui fait tous les jours.

01:23:06
JMC: S’il y avait une solution miracle, je suis désolé de terminer par une note qui n’est peut être pas aussi gaie que s’il y avait une solution miracle l’a déjà trouvé. Il n’y a pas de solution miracle. Il faut répéter, répéter, répéter.

01:23:16
FB: Ça ne va pas assez vite. Eh bien, moi, je vais essayer de mettre un tout petit peu plus d’espérance pour cette conclusion parce que je pense qu’effectivement, on est dans le moment de la prise de conscience. Je pense qu’il y a effectivement une opinion publique qui est en train de basculer. Je pense que la crise sanitaire, la crise du coronavirus a aussi beaucoup permis aux gens de se poser et d’un coût de réfléchir. Et donc, le meilleur est à venir. En tout cas, nous, on va continuer d’y réfléchir ensemble. Merci beaucoup. Cher Jean-Marc. Le temps file, donc on est arrivé au terme de cette conférence. Merci à toutes et à tous pour votre participation active. Cette conférence sera à voir et à revoir en replay. Les équipes d’EDF vont faire en sorte de la mettre de manière disponible sur un lien YouTube. Vous pourrez ainsi la partager. Je pense que ça devrait animer vos barbecues et apéros de l’été. Et puis donc, merci. Merci, cher Jean-Marc, pour votre présence aujourd’hui. Merci Thomas, Olivier Aléoutiennes. On se retrouve à la rentrée pour la suite de notre cycle de conférences en attendant bel été à tous. Merci beaucoup.

 

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